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Chronique

Pourquoi il faut défendre l'accord UE-Mercosur

LE CERLCE - Les opposants au traité commercial entre l'Europe et les principaux pays d'Amérique du Sud ont tort, estime Jacques Delpla. Favoriser le libre-échange reste la meilleure solution pour assurer la prospérité de tous et lutter contre le réchauffement climatique.

Le port de Santos, au Brésil, l'un des plus grands au monde.
Le port de Santos, au Brésil, l'un des plus grands au monde. (Nelson Almeida/AFP)

Par Jacques Delpla (économiste, Président de KLIMATEK SAS)

Publié le 12 sept. 2019 à 10:45

Avec le récent accord de libre-échange entre le Mercosur et l'Union européenne, le discours protectionniste revient en France. Pourtant, la théorie économique infirme le protectionnisme. Pour la lutte climatique, le bon combat est celui d'un prix du carbone assez élevé et croissant dans le temps, appliqué aux carburants du commerce maritime.

L'accord commercial de l'UE avec les pays du Mercosur est un accord de libre-échange classique, qui abroge graduellement les barrières douanières (aujourd'hui à 12 % pour les produits agricoles et de 4 % pour les biens industriels en UE, 30 % pour le Mercosur). Il impose à chaque partie le respect des normes et traités internationaux dans les domaines de l'environnement (et en particulier du climat). Enfin, un tribunal arbitral international permettra de faire respecter ces engagements. Les oppositions à l'accord UE avec le Mercosur sont donc contre-productives.

Premièrement, un thème unit les économistes : leur soutien sans ambiguïté au libre-échange commercial, alors même que le public est protectionniste. Car le libre-échange conduit à une allocation optimale des ressources (avec spécialisation de chaque pays dans ses avantages comparatifs) et élimine les rentes des secteurs protégés. Les droits de douanes sont comme des obstacles physiques au commerce international. Paul Krugman écrit que le commerce international est analogue au progrès technique : il augmente la richesse totale des deux pays, sans préjuger des effets redistributifs. Que certains perdent au libre-échange est possible, mais la solution n'est pas de s'opposer à l'accord avec le Mercosur. Elle est de taxer les gains globaux du libre-échange et de compenser les perdants de ce même libre-échange.

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Deuxièmement, l'argument climatique contre le libre-échange ne tient pas. Il ne faut pas renoncer au progrès économique que constitue le libre-échange, mais taxer suffisamment le carburant utilisé (principe du pollueur - payeur). Pour le commerce maritime, il suffit que les ports de l'UE taxent le carburant des bateaux. Cela est entièrement de la souveraineté de l'Union. En outre, l'accord UE-Mercosur impose au Brésil de rester dans l'accord climatique de Paris. Or si l'UE ne ratifie pas son accord avec le Mercosur, le Brésil se tournera vers les Etats-Unis de Trump et s'écartera définitivement des accords climatiques que nous voulons.

Protection de l'Amazonie

Troisièmement, la déforestation de l'Amazonie. Si l'Europe veut protéger l'Amazonie, le protectionnisme n'y fera rien, car les Brésiliens ne veulent pas rester dans la pauvreté. Il faut envisager de payer les Brésiliens pour qu'ils entretiennent la forêt amazonienne.

Quatrièmement, comme l'indique le traité, le tribunal d'arbitrage international sera le même qui permettra à l'Europe de vérifier si le Brésil se conformera à ses engagements climatiques. Refuser cet accord commercial revient à renoncer à ces tribunaux d'arbitrage qui sont notre seul levier pour la mise en application des accords climatiques par le Brésil.

Au moment où Trump veut détruire le multilatéralisme (qui protège le droit international et les petits pays) en faveur du pur rapport de force, il est curieux que tant de voix en France s'allient objectivement au président américain en combattant cet accord multilatéral entre Europe et Amérique du Sud.

Jacques Delpla est directeur d'Asterion.

Jacques Delpla

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