Menu
Libération
«Nouveau chapitre»

En Autriche, Sebastian Kurz déserte son parti après la chancellerie

Deux mois après son départ du gouvernement en raison d’une affaire de corruption, l’ex-chancelier a annoncé ce jeudi qu’il démissionnait de la présidence du mouvement conservateur OVP.
par Geoffrey Desvaux
publié le 2 décembre 2021 à 20h38

C’est un coup de tonnerre dans la politique autrichienne. L’ex-chancelier Sebastian Kurz quitte la vie politique. Il a annoncé ce jeudi sa démission de la présidence du parti de droite OVP lors d’une conférence de presse, près de deux mois après son départ de la chancellerie : «C’est un nouveau chapitre de ma vie qui s’ouvre aujourd’hui.»

En octobre, il avait été contraint de démissionner du gouvernement à la suite de révélations dans une affaire de corruption, entraînant la levée de son immunité parlementaire. Malgré ces remous, Kurz avait réussi à garder la tête hors de l’eau en obtenant la présidence de son parti de droite, OVP. Remplacé à la chancellerie par Alexander Schallenberg, son collaborateur et ex-ministre des Affaires étrangères, «l’enfant prodige» de la politique qui a accédé au pouvoir à 31 ans restait ainsi proche du sommet de l’Etat.

Selon l’ex-chancelier, la récente naissance de son fils «a provoqué en lui un déclic». Mais son implication dans une histoire de corruption avec neuf autres suspects serait la véritable cause de son départ. Ce jeudi, durant sa conférence de presse, il a expliqué être «usé» par ces récentes accusations, ajoutant : «Je ne suis ni un saint ni un criminel, je suis un être humain.»

Sondages et articles élogieux

Début octobre, le parquet anti-corruption a ouvert une enquête contre Kurz, accusé d’avoir utilisé de l’argent public pour s’acheter une couverture favorable dans les médias, entre 2016 et 2018. Alors ministre des Affaires étrangères, il aurait procédé à l’achat de nombreux espaces publicitaires dans le tabloïd Österreich, en échange de sondages et d’articles élogieux. Une thèse étayée par des messages entre Kurz et neuf autres suspects, récupérés par les enquêteurs dans le cadre d’une autre affaire de corruption.

En octobre, Kurz avait tenté de se justifier lors du sommet européen en Slovénie. «Quelques bribes de SMS ont été sorties de leur contexte ou déformées, et un dossier criminel a été bâti autour d’elles. Je suis convaincu que ces allégations seront bientôt démontées», avait-il déclaré.

La carrière de Kurz était déjà entachée par une précédente affaire de corruption. Lors de son premier mandat il y a quatre ans, il avait été rattrapé par le scandale Ibizagate. En août 2017, la justice avait mis au jour la combine du vice-chancelier Heinz-Christian Strache, soupçonné d’avoir œuvré pour favoriser un de ses proches en échange de dons à son parti et de vacances au soleil. Alors président du parti d’extrême droite FPÖ, Strache avait démissionné au printemps 2019 avant d’écoper, quelques mois plus tard, de 15 mois de prison avec sursis pour corruption.

Dans cette affaire, qui avait fait voler en éclat la coalition entre son parti conservateur et le FPÖ, Sebastian Kurz aurait formulé un faux témoignage devant la commission parlementaire. Ce qu’il a nié en bloc. Selon le quotidien allemand Die Welt, toutes ces affaires n’ont en réalité jamais modifié son fonctionnement, ni son comportement : «Il n’a pas tiré les conséquences de ce dont il est accusé […]. Il s’est juste sauvé de la ligne de tir.» Ce jeudi, Kurz a évoqué l’avenir et un nouveau «défi professionnel» qui l’attendait.

Pour aller plus loin :

Dans la même rubrique