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Taxes, quotas : la tarification du carbone progresse fortement dans le monde

Il existe aujourd'hui une petite cinquantaine de systèmes de tarification du carbone. Ils ont généré 57 milliards de dollars en 2020, selon un bilan d'I4CE. C'est trois fois plus qu'en 2016. Mais le prix de près de la moitié des émissions de CO 2 couvertes est encore trop faible pour inciter à décarboner.

Une aciérie dans la province de Hebei, au nord de la Chine, en 2019.
Une aciérie dans la province de Hebei, au nord de la Chine, en 2019. (Fred Dufour/AFP)

Par Muryel Jacque

Publié le 21 oct. 2021 à 09:23Mis à jour le 21 oct. 2021 à 16:12

Interrogés en tout début d'année dans le cadre d'une enquête du Credoc, moins d'un quart des Français se disaient prêts à payer plus de taxes sur les carburants, le gaz naturel ou le fioul domestique afin de lutter contre le réchauffement climatique. Et c'était avant la crise énergétique actuelle liée à la flambée des prix. Malgré ce soutien limité de l'opinion à la « taxe carbone » - qu'on retrouve ailleurs -, cette tarification continue à gagner du terrain dans le monde.

Depuis le 1er janvier, l'Allemagne a instauré un système national d'échanges de quotas pour les émissions de CO2 qui ne sont pas couvertes par le mécanisme européen. Cet été, la Chine a lancé son marché carbone interne, devenu le plus grand au monde devant celui de l'UE. Quand, Brexit oblige, le Royaume-Uni est sorti du marché européen et dispose désormais d'un système qui lui est propre. L'idée que l'UE mette sur les rails la première taxe carbone aux frontières (qu'elle désigne sous le nom de « mécanisme d'ajustement carbone aux frontières ») fait aussi réfléchir plusieurs pays, comme la Russie, la Malaisie, le Kazakhstan ou la Thaïlande.

56,8 milliards de revenus

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Au total, 47 régions, pays ou groupements de pays, qui représentent ensemble 60 % du PIB mondial, disposaient d'un prix du carbone en 2020, selon un bilan dressé par l'Institut de l'économie pour le climat (I4CE) et publié ce jeudi. « Le sujet carbone continue d'avancer, observe Marion Fetet, chargée de recherche chez I4CE. Il y a une vraie dynamique en dépit de la pandémie de Covid. »

Le think tank a calculé que les revenus générés par les taxes et les marchés carbone de la planète ont fortement augmenté en un an : tirés à 52 % des taxes et à 48 % des marchés de quotas, ils ont atteint 56,8 milliards de dollars en 2020, contre 48 milliards en 2019, et moins de 17 milliards en 2016. L'emballement des prix au niveau européen n'y est d'ailleurs pas étranger.

Cette « récolte » mondiale reste toutefois très faible au regard des subventions aux énergies fossiles qui s'élèvent « encore a minima à 450 milliards de dollars » en 2020, soulignent les auteurs du rapport. Ils pointent également et surtout les disparités importantes des prix du carbone, de moins d'un dollar par tonne d'équivalent CO2 en Ukraine par exemple, à 142 dollars en Suède, qui sont aussi le reflet des niveaux de vie très différents d'un pays à l'autre.

« Crédit d'impôt climat »

Au final, près de la moitié des émissions régulées sont couvertes par un prix inférieur à 10 dollars… Loin du consensus scientifique qui estime que pour atteindre « le plein effet d'incitation », il faut qu'il soit compris entre 40 et 80 dollars par tonne, indique le think tank. Avec un prix de 44,60 euros (soit 54 dollars), la France entre dans cette norme et sa taxe - la fameuse « contribution énergie climat » mise en place en 2014 et gelée après le mouvement des « gilets jaunes » - , qui touche 35 % de ses émissions de CO2, lui a rapporté un peu plus de 8,3 milliards de dollars l'an passé, selon I4CE. Un record dans le monde.

Les chiffres clefs pour la France

124,20 dollars

Les revenus carbone par habitant

0,29 %

La part des revenus carbone par habitant dans le revenu national brut (RNB)

4,51 tonnes d'équivalent CO2

Les émissions de gaz à effet de serre par habitant

(Sources : Chiffres clés du climat, 2021)

Où va l'argent ? Là encore, le fléchage varie selon les régions. Si en France ou dans les pays du nord de l'Europe les revenus vont au budget général de l'Etat, en Europe une bonne partie est fléchée vers des projets « verts », et la totalité au Japon ou en Californie. La Suisse a, elle, décidé d'en verser un tiers à un fonds pour le climat et redistribue les deux autres tiers à la population via un chèque de l'assurance maladie. La Colombie-Britannique au Canada en reverse, de son côté, une partie sous la forme d'un « crédit d'impôt de l'action climat » aux ménages à revenus faibles et moyens.

« Taxer le carbone permet de faire évoluer les comportements vers des pratiques plus favorables au climat, mais la transparence sur l'usage des revenus et l'accompagnement des habitants sont essentiels pour le faire accepter », résume Marion Fetet. Et gagner ainsi davantage le soutien de l'opinion.

Muryel Jacque

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