La verdure est-elle le secret pour ralentir le processus de vieillissement biologique ?

Publié le par Alexandra Bresson

Une densité importante d'espaces verts proches d'un milieu urbain a de nombreux avantages pour la santé mentale et physique et pourrait même contribuer à ralentir le vieillissement biologique selon une nouvelle étude.

Les villes disposant d’espaces verts attrayants et bien connectés peuvent offrir à leurs résidents un cadre leur permettant de pratiquer une activité physique et de loisirs, de se déstresser et d’engager des contacts sociaux. Il a ainsi été démontré selon l'OMS que « les villes dotées d’espaces verts sont susceptibles d’abriter une population en meilleure santé, ce qui allège la pression exercée sur les services de santé et contribue à une économie plus forte. » Si le fait d'être entouré de verdure s'avère bénéfique pour l'esprit et pour le corps, une étude menée par des chercheurs de l’université Monash indique que cette habitude apporte aussi des bienfaits d'un point de vue physiologique, à savoir allonger la durée de vie.

Publiée dans la revue « Environmental Health Perspectives », celle-ci montre un lien entre la quantité de vie végétale dans l'environnement immédiat d'une personne et un vieillissement biologique plus lent, basé sur des changements dans la méthylation de l'ADN. « Nous n’avons trouvé qu'un seul résumé, présenté lors d'une conférence mais jamais rédigé et publié dans une revue à comité de lecture, qui abordait ce sujet. », affirme le Pr Rongbin Xu, auteur principal de l’étude. « Il s'est concentré sur les nourrissons et a comparé leur âge gestationnel biologique avec la verdure entourant la mère pendant la grossesse. Il s'agissait donc d'une application assez différente de notre étude actuelle. »

L'âge biologique, en lien direct avec l'ADN

L'équipe scientifique est parti du constat qu'avec une population mondiale vieillissante en lien avec une longévité accrue et des taux de natalité en baisse, comprendre comment prolonger une espérance de vie en bonne santé jusqu'à un âge avancé est une priorité. L'un des marqueurs les plus robustes du vieillissement biologique est les changements de méthylation liés au vieillissement trouvés dans l'ADN d'un individu. De nombreux facteurs (tabac, stress, alimentation…) ont une action plus ou moins marquée et durable. C’est le cas du vieillissement : certaines marques épigénétiques, comme les méthylations de l'ADN qui régulent l'expression des gènes, diminuent progressivement dans le temps.

Certaines sections d'ADN sont particulièrement sujettes à une méthylation accrue avec l'âge, ce qui restreint la fonctionnalité des gènes affectés. À l'inverse, le vieillissement peut également réduire la méthylation dans d'autres domaines, entraînant une surexpression des gènes, qui peut être tout aussi nocive. Les chercheurs ont souhaité se concentrer sur la mesure de l'âge biologique d'une personne tel que mesuré par la méthylation, et il existe un algorithme couramment utilisé pour le calculer : GrimAge. « De plus en plus de recherches indiquent qu'il est peut-être l'estimateur le plus robuste, compte tenu de son pouvoir prédictif de la santé future, comme l'espérance de vie. », précisent les chercheurs.

« Un degré élevé de végétation réduit les dommages causés par la pollution et la chaleur »

En comparant « l'âge ADN » d'un individu à son âge chronologique (années depuis la naissance), il est possible de calculer l'accélération du vieillissement biologique, une accélération accrue étant associée à une mort précoce et à de nombreuses maladies du vieillissement (cancer, maladies cardiaques...). « Nous avons supposé que la quantité de verdure dans l'environnement immédiat d'une personne peut jouer un rôle dans la réduction du vieillissement biologique accéléré. », note le Pr Rongbin Xu. « Un degré élevé de densité de végétation locale peut réduire le stress mental, offrir un espace d'interaction sociale, encourager l'activité physique et réduire les dommages causés par la pollution et la chaleur. »

Les chercheurs ont exploité les données d'une étude qui avait précédemment exploré les liens entre les facteurs environnementaux, génétiques et liés au mode de vie et la densité du tissu mammaire, un facteur de risque connu du cancer du sein. Les niveaux de méthylation de l'ADN ont été analysés en laboratoire via des échantillons de sang et l'âge « ADN » a été calculé pour chacune des 479 participantes issues de 130 familles différentes. La deuxième partie du projet a consisté à cartographier les niveaux de végétation à proximité des domiciles des participantes, qui ont dû accepter de fournir leurs adresses résidentielles converties en coordonnées à l'aide d'une interface Google Maps.

Une meilleure immunité et un risque d'obésité réduit

L'équipe a utilisé un satellite pour estimer la densité de verdure dans un rayon de 2 km autour de chaque maison au cours des 12 mois précédant la prise de sang des participantes. « Nous avons découvert qu'en utilisant le plus robuste des algorithmes, GrimAge, l'augmentation de la verdure environnante était associée à un vieillissement biologique plus lent. », notent les chercheurs. « Cela équivaut à une réduction de 3% de la mortalité toutes causes confondues. L'association est restée stable lors de la mesure de la verdure à 300 mètres, un kilomètre et deux kilomètres de la maison. » Trois phénomènes en lien avec cet environnement vert ont été identifiés pour expliquer cet effet bénéfique.

Il s'avère que les espaces verts favorisent un vieillissement biologique ralenti grâce à un effet d'inversion des changements de méthylation de l'ADN résultant de l'exposition à la fumée de tabac et à une amélioration de la fonction immunitaire et de la santé métabolique (anomalies physiologiques qui peuvent conduire à des maladies chroniques). Enfin, la verdure peut être associée à une réduction des tissus adipeux et à une meilleure santé rénale. « D'autres recherches sont nécessaires pour confirmer nos résultats dans des études plus vastes et pour examiner le processus chez les hommes, mais c'est une incursion passionnante dans ce domaine. », conclut l'équipe scientifique.