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Meurtrier des Cévennes : une traque hors normes

Depuis mercredi, 300 gendarmes se relaient dans un carré de 15 km de côté, utilisant un matériel de pointe pour retrouver, si possible vivant, le fugitif. Le jeune homme de 29 ans, suspecté de deux homicides, a fui mardi dans la forêt.

Une aiguille vivante, venimeuse et camouflée, dans une botte de foin. La traque de Valentin Marcone, qui a abattu mardi 11 mai dernier son patron et un de ses collègues aux Plantiers, petit village sur les flancs du mont Aigoual dans les Cévennes gardoises, se poursuit ce jeudi. «La zone d'action est un quadrilatère de 15km sur 15km, soumis à un contrôle de zone. Nous avons engagé à l'intérieur des gendarmes avec des moyens extrêmement lourds, extrêmement sophistiqués» indiquait dès mercredi matin à la presse le colonel Laurent Haas, commandant de la gendarmerie du Gard.

Environ 300 personnes sont engagées depuis le début des recherches, et de nouveaux soldats devraient être déployés ce jeudi soir, portant l'effectif complet à environ 350 personnes. Tous les métiers de la gendarmerie sont engagés ; le GIGN a apporté soixante soldats, et huit hélicoptères ont également été affectés à la traque et se relaient depuis mardi matin sur la zone.

«Coups de sonde», caméras thermiques et chiens Saint-Hubert

La nature du terrain constitue une première difficulté. La zone de recherche est particulièrement escarpée et boisée et constitue un «décor extrêmement complexe d'accès», comme a déclaré le général Philippe Ott (commandant en second de la région PACA) ce jeudi lors d'une conférence de presse. Une dizaine de hameaux sont encaissés et entourés de crêtes boisées appelées localement «serres» : forêt dense et piégeuse, l'ensemble est en plus parsemé de grottes et de reliefs rocheux. Pour guider les équipes sur le terrain, des cartographes, appelés par la section de recherche de Nîmes, fournissent en direct des indications par radio et repèrent certains points stratégiques.

La seconde difficulté vient du fait que le fugitif connaît bien la zone dans laquelle il est actuellement en fuite. «L'auteur des faits connaît parfaitement le coin, il y habite, il le pratique et a cet avantage» avait indiqué mercredi le colonel Haas. Habitant sur place depuis dix ans, le mis en cause est chasseur et tireur sportif, et serait armé d'une arme de poing ainsi que d'un fusil d'une portée d'environ 300 mètres, une arme redoutable lorsqu'elle est équipée d'une lunette de visée. Face à cet homme a priori bien équipé, son comportement en cas de rencontre constituerait donc un troisième défi. Des tireurs de précision sont opérationnels pour sécuriser tout contact. «Nous nous souvenons de la mort de trois de nos camarades en décembre dernier [dans le Puy-de-Dôme, NDLR] tués par un homme peut-être différent, mais présentant un profil similaire sur certains aspects», a noté jeudi le général Ott.

Un tireur de précision ou «sniper», à bord d'un véhicule de gendarmerie équipé d'un toit dépliable et blindé. CLEMENT MAHOUDEAU / AFP

Comment, justement, les équipes de gendarmerie comptent-elles repérer Valentin Marcone ? Sur plusieurs médias, le commandant Ghislain Réty, commandant du GIGN, a décrit une manœuvre double, consistant à la fois à encercler la zone, et à la ratisser en opérant des «coups de sonde» dans les grottes et refuges possibles : bergeries, caches de toutes natures. Ces explorations sont effectuées par le GIGN, qui utilise des véhicules blindés, et des drones «pour prendre le minimum de risque tout en garantissant le succès de la mission» détaille le militaire.

Ce jeudi, le message enregistré par le père de Valentin Marcone, lui demandant de revenir à la raison et de se rendre, a également été diffusé par des mégaphones, dans la zone d'action. Pour Philippe Ott, «il s'agit d'une manœuvre d'influence, qui fait partie de notre palette même si on l'utilise rarement, car il y a le risque d'énerver le fugitif».

Les explorations sont effectuées par le GIGN. CLEMENT MAHOUDEAU / AFP

En plus des drones, huit hélicoptères se relaient pour des analyses visuelles et à l'aide de caméras thermiques et infrarouges. Les recherches continuent également dans l'obscurité mais la forêt, très giboyeuse, risque à tout moment d'induire les analystes en erreur. Enfin, un ou plusieurs chiens de race Saint-Hubert ont également été transportés sur la zone et pourraient aider les équipes avec leur odorat surdéveloppé. Mercredi, Laurent Haas avait indiqué que «les chiens de la brigade cynophile [avaient] d'ores et déjà repéré des itinéraires de fuite«, mais les odeurs étaient interrompues par les cours d'eau, compliquant d'autant la recherche.

VOIR AUSSI - Les gendarmes toujours à la recherche du meurtrier présumé dans les Cévennes

L'hypothèse d'un suicide sous les balles des gendarmes

Quels sont les scénarios d'approche possibles pour le fugitif? Ce jeudi, le général Ott et le procureur de la République du Gard Eric Maurel ont souligné ne pas privilégier la méthode de l'attrition, consistant à attendre que l'homme traqué s'épuise pour l'interpeller. «Clairement, on va le chercher», a affirmé le général Ott. «On veut le trouver, le gros des forces engagées est dans une nature isolée à sa poursuite. L'usure peut certes être la sienne, mais peut nous toucher également», ajoutait-il. «Ce n'est pas un jeu d'usure, les gendarmes ne sont pas dans l'attente, ils sont engagés, avec un courage discret» saluait le procureur Eric Maurel. Près du domicile de fugitif, des sacs de sable ont également été trouvés, pouvant laisser penser que l'homme s'est aménagé «un ou plusieurs postes de combat» selon Philippe Ott, qui ne néglige pas l'hypothèse d'un «jusqu’au-boutisme qui lui aurait fait choisir une issue dramatique», et de mourir sous les balles des gendarmes.

S'il est localisé et que les conditions sont réunies, un dialogue pourrait toutefois être engagé, à l'aide de négociateurs, l'objectif étant de lui faire déposer les armes. Les méthodes sont diverses. Enfin, l'hypothèse selon laquelle il aurait quitté la zone, ou celle d'un suicide, ne sont absolument pas exclues, a rappelé le général Ott.

Les hameaux environnant le bourg principal des Plantiers sont également sécurisés. CLEMENT MAHOUDEAU / AFP

Le village, confiné, aide les équipes de recherche

L'autre mission des forces de l'ordre est de protéger la population face au dangereux suspect, et de faire avancer l'appel à témoin. Ce jeudi, le général Ott a déclaré qu'une «cinquantaine d'appels» avait été reçue, et qu'ils n'avaient rien donné après levée de doutes. De même, des coups de feu auraient été entendus aux abords et dans la zone de recherche par des riverains, mais là encore, les investigations n'ont donné aucun résultat. «Les rotors des hélicoptères de gendarmerie produisent des sons particuliers notamment dans certains reliefs, cela a pu induire les témoins en erreur» s'interrogeait le général Ott ce jeudi.

En attendant, les habitants des Plantiers restent confinés chez eux, ne pouvant sortir que pour des raisons valables. Une équipe médicopsychologique, la Croix Rouge et des pompiers ont été dépêchés sur place. Quatre familles ont en outre demandé à être «exfiltrées», a indiqué le maire de la commune Bernard Mounier à l'AFP. Et en cas de mouvement, les véhicules sont contrôlés aux abords de la zone d'action.

Un gendarme contrôle un véhicule à proximité de la zone d'action. SYLVAIN THOMAS / AFP

Pour autant, les villageois ne restent pas inactifs, et ont même hébergé ou restauré certaines équipes, comme l'a indiqué hier mercredi la sous-préfète du Vigan Saadia Tamelikecht auprès de France 3 Occitanie : «Nous pouvons remercier les administrés de la commune qui ont accueilli les forces d'appui, le personnel de secours, ou même les voisins qui ne pouvaient rejoindre leur domicile» a-t-elle salué. «Dans un secteur où vous vous doutez bien que les hôtels ne courent pas les rues, la porte ouverte des voisins, des aubergistes qui ont cuisiné, a été d'un secours précieux», a-t-elle ajouté.

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418 commentaires
  • 2389353 Le Pragmatique

    le

    Il s'est rendu. Tout ce battage fait un flop.

  • Philippe Potier

    le

    Une solution : relâcher Nordahl Lelandais dans la zone. En espérant qu'ils croiseront Dupont de Ligonès.

  • Pikendorf

    le

    J'ai même vu 2 généraux pour 350 hommes ! Si le gars est malin, il a depuis longtemps quitté la zone.

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