Billet

Nouvel effet collatéral de la pandémie : le retour du «man bun»

On pensait ce chignon pour hommes échoué dans les limbes de la fin des années 2010. C'était sans compter sur la pandémie (et la fermeture des salons de coiffure), qui ne nous aura décidément rien épargné.
par Charles Delouche-Bertolasi
publié le 22 janvier 2021 à 10h20

Alors comme ça, il serait de retour ? Quelques mois de confinement auraient suffi pour qu'il réapparaisse. Le man bun, ce chignon masculin, qui ressemble à s'y méprendre à un oignon et qu'on pensait mort-né depuis 2016, année de son âge d'or.

Le man bun a des origines nobles, qui remontent au Japon du XVIsiècle. Appelé chonmage, il est à l'époque une coiffure réservée aux samouraïs et une méthode pour permettre au casque du combattant de rester stable. Mais en 2021, le bun est plutôt perçu comme une balle antistress aux airs de protubérance phallique qu'il convient de nouer toujours plus en évidence sur le sommet du cigare.

La flemme de se coiffer

The Guardian l'affirme : le man bun s'est nourri du Covid-19. La bible anglaise prend pour exemple les tignasses post-confinement arborées par le rappeur Post Malone ou le Beatle Paul McCartney. L'auteur de Yesterday (78 ans) a été paparazzé pendant ses vacances aux Caraïbes avec sa femme Nancy Shevell, torse dénudé, tétons au vent et, donc, la caboche surmontée d'un subtil palmier ou «kiki» grisonnant. Symbole d'une résurgence d'une tendance honnie ou évolution logique de la masse de cheveux accumulée à l'heure du télétravail généralisé ?

Passé de mode, comme la panoplie rincée du bon hipster (chemises à carreaux façon bûcheron, barbe hirsute, vélo «fixie»), voilà que le bun ressurgit donc à l'aune d'un possible troisième confinement. Un round de plus pour les irréductibles chevelus, les réfractaires de la tonte, les téméraires de la mèche qui en ont profité pour reprendre du poil de la bête. Dans l'ombre de la pandémie, on en soupçonne quelques-uns d'être allés jusqu'à gober des capsules de levure de bière pour parfaire leur crinière. Et puis, la flemme de se coiffer a pointé. Passée la terrible étape de la coupe «casque», sans avoir non plus cédé aux sirènes du mulet, certains ont discipliné le tout à l'aide d'un chouchou. En l'absence du collègue charrieur au parfait dégradé, on s'est laissé aller à la folie des longueurs.

Au fil des années, le petit chignon s'est éloigné de la sommaire queue-de-cheval de tonton. Il s'est affranchi, a gravi les centimètres, mèche après mèche, se nichant sur la caboche de stars d'Hollywood comme Brad Pitt ou Jared Leto. En 2004, certains minots avaient déjà tenté le coup : s'il était difficile de reproduire la technique balle au pied de David Beckham époque Real Madrid, on pouvait rêver de l'imiter en se laissant pousser les tifs, pour s'affirmer parmi les boules à zéro et autres têtes baignant dans le gel qui garnissaient les préaux.

Confession

En vérité, on le confesse, on grandi avec le bun, en jetant des regards envieux, teintés de jalousie, à ceux qui l'osaient tout en préférant adhérer à la masse qui les couvrait d'opprobre. Il fallait bien un confinement pour qu'on se lance. Neuf mois sans un rendez-vous chez le coiffeur ont boosté les fantasmes de votre serviteur. On a pris quelques risques : les mèches relâchées tombant sur les oreilles à la Dave, ou bien gominés en arrière façon Vincent Vega dans Pulp Fiction, en passant par la choucroute bouclée du matin, modeste hommage à Patrick Hernandez. Las, à quelques semaines de toucher au but (l'élastique dans la ligne de mire), on a cédé aux injonctions sociales : les fêtes de fin d'année, les grands-parents, la pression du présentiel... Couic couic. Et on a coupé, puis regretté, le regard embué.

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