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Restaurants : ce courrier envoyé par des assureurs qui remet le feu aux poudres

Si les restaurateurs ne signent pas l'avenant proposé par les assureurs ils seront résiliés.
Si les restaurateurs ne signent pas l'avenant proposé par les assureurs ils seront résiliés. Elio ZOPPI / ZOE - stock.adobe.com

De nombreux restaurateurs, comme le chef Jean-François Piège, se sont vu proposer un avenant à leur contrat d'assurance leur indiquant qu'ils ne seront plus indemnisés en cas d'épidémie en 2021.

Un malheur n’arrive jamais seul. Fermés depuis le 30 novembre, et ce pour la deuxième fois, certains restaurateurs doivent maintenant se trouver un nouvel assureur. La faute à un avenant à leur contrat d'assurance qu’ils ont refusé de signer.

Dans un courrier envoyé au mois d'octobre, les assurés se sont vu proposer le choix suivant : soit ils signent un avenant qui exclut toute indemnisation en cas d'épidémie à partir du 1er janvier 2021. Soit ils ne sont plus assurés du tout. Un dilemme que le chef Jean-François Piège, assuré par Axa, a dénoncé sur Twitter le 11 novembre dernier : «Voilà comment s’exprime la solidarité d’@AXAFrance en parallèle de la com institutionnelle : après avoir refusé de nous indemniser, Axa a voulu nous faire signer un avenant qui diminuait nos garanties. Nous avons refusé. J’ai reçu hier ce courrier de résiliation», écrivait-il, joignant une photo dudit courrier.

L’avenant en question, qu'Axa n'est pas le seul assureur à proposer, introduit en effet une clause d’exclusion générale : «Ne sont pas garantis par ce contrat : les frais, les pertes, les pertes d’exploitation et les dommages consécutifs à une épidémie, à une pandémie ou à une épizootie, ainsi que les frais, les pertes, les pertes d’exploitation et les dommages consécutifs aux mesures administratives, aux mesures sanitaires, à la fermeture totale ou partielle ou au retrait d’autorisation administrative, à l’impossibilité, à la restriction ou à la difficulté d’accès, qui en résultent. » En cas de refus de signer, les assurés sont résiliés et doivent trouver un nouvel assureur.

De nombreux restaurateurs et hôteliers sont aussi concernés, explique Mathieu Eychène, avocat au sein du cabinet Rondot, Eychène, Fréminville qui a lancé le site Dartagnan.legal afin de faciliter les recours en justice des professionnels du secteur en quête d'indemnisation. Si certains de ses clients ont refusé de se plier à cette nouvelle clause, d’autres «ont signé sous la contrainte», indique-t-il. Et c’est bien ce que son cabinet cherche à déterminer. «Les contrats d’assurance sont à durée déterminée et l’assureur peut ne pas le renouveler ou conditionner le renouvellement à la signature de cet avenant», explique-t-il. «Mais nous étudions la possibilité de démontrer que, si certains assurés ont signé cet avenant, cet accord a été contraint ou que l’assureur n’a pas agi de manière loyale, conduisant donc à s'interroger sur la validité de l’avenant», poursuit-il. En d’autres termes, si l’assureur a bien la possibilité d’imposer un avenant, «l’usage de cette faculté peut être considéré comme abusif».

Un besoin de clarté

Du côté des assureurs, on justifie la nécessité de créer cet avenant par un besoin de clarté. Dans un document datant du 23 juin dernier, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) appelle en effet «les professionnels à revoir pour l’avenir la rédaction de toutes les clauses contractuelles ambiguës et à préciser l’architecture générale des contrats afin d’informer clairement les assurés de l’étendue exacte de leurs garanties». Une consigne suivie à la lettre par la Fédération française de l’Assurance : «Dans 93% des contrats, la pandémie n'est pas un motif d'indemnisation. Mais il y a environ 7% des contrats de restaurateurs français dans lesquels la rédaction de la clause, qui évoquait souvent simplement une 'épidémie', portait à interprétation», souligne son délégué général adjoint, Stéphane Pénet auprès d’Europe 1.

De quelle clause parle Stéphane Pénet ? On la retrouve dans les contrats d'assurance couvrant les épidémies ; elle exclut toute indemnisation en cas de fermeture administrative de plusieurs établissements sur le même département. C'est précisément cette clause qui empêche Jean-François Piège d'être indemnisé, lui qui possède quatre de ses établissements sous contrat avec Axa. Le chef a toutefois lancé un recours pour tenter de contester cet élément de son contrat et espère que la justice lui donnera raison comme l'ont fait plusieurs tribunaux de commerce, notamment Paris, Marseille et Nanterre. En octobre, Axa a ainsi été condamné à garantir les pertes financières provoquées par le confinement de deux restaurateurs marseillais, en rejetant la clause d'exclusion. L'assureur français a fait appel de sa condamnation par le tribunal de commerce de Marseille, dénonçant «une confusion judiciaire».

Mais surtout, pour Jean-François Piège, l'avenant au contrat que lui impose son assureur est bien la preuve que cette clause n'est pas valable et qu'il devrait être indemnisé pour les pertes engrangées en 2020. «Ils ont changé leur contrat car ils n’assument pas leur rôle d’assureur c'est-à-dire de nous assurer sur ce sur quoi on a signé un contrat», fulmine-t-il. Et de conclure : «Nous restaurateurs, nous nous battons pour une question de survie. Ce n'est pas pour protéger nos bénéfices mais bien pour ne pas mourir».

À VOIR AUSSI - «On ne sera pas les pestiférés de la France!» : à Marseille, des milliers de restaurateurs manifestent contre leur fermeture

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95 commentaires
  • ALBERT LE RETRAITE

    le

    Les pandémies et leurs conséquences non prévisibles statistiquement car nous n'avons pas le recul pour l'évaluer ne peuvent pas être prises en compte par les assurances.
    Il y a en moyenne tous les 50 ans des pandémies (grippe asiatique, grippe dite espagnole, etc ..) mais l'implication des gouvernements n'avaient jamais existé.
    Nous sommes dans un monde devenu assisté et les assurances pour évaluer le coût des cotisations sont probablement inconnu sauf si l’État l'assure.
    Pour une fois j'excuse les assurances.

  • Ver5gétorix

    le

    On peut dire que leur assureur les respecte car "il propose un avenant pour ne plus assurer contre une épidémie". Quant c'est un simple particulier, qu'il s'agisse de sa bagnole, de sa maison, ou de toute autre assurance dans un sport ou lors de voyages à l'étranger, l'assureur n'est pas aussi poli, c'est simplement signe cet "avenant" ou dégage illico. D'ailleurs les assureurs jouent facilement sur les mots: Sur la forme un avenant c'est forcément et nommément proposé de façon avenante sinon ça ne s'appellerait pas comme cela. Sur le fond, il y a cas de force majeure donc l'assureur s'adapte car le coeur de son métier c'est de faire de l'argent, sinon comment croyez-vous qu'on pourrait amortir les autres risques.

  • Ping et Pong

    le

    Les pilleurs de tombeaux

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