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Enquête ouverte sur des clips jugés antisémites de Freeze Corleone, figure montante du rap français

Le rappeur Freeze Corleone

Le rappeur Freeze Corleone - YouTube (Freeze Corleone)

Du ministre de l'Intérieur à plusieurs députés de la majorité, les réactions politiques ont été nombreuses pour dénoncer les paroles plusieurs chansons, et la diffusion de clips sur les réseaux sociaux.

Le parquet de Paris a ouvert jeudi une enquête pour "provocation à la haine raciale", visant plusieurs clips et chansons de Freeze Corleone, une figure montante du rap français dont les paroles ont provoqué l'indignation de plusieurs élus.

Quelques heures après la montée d'une polémique sur les paroles de ses chansons, le procureur de Paris, Rémy Heitz, a annoncé dans un communiqué avoir "pris l'initiative d'ouvrir (...) une enquête portant sur différents clips vidéo et chansons de Freeze Corleone" pour "provocation à la haine raciale" et "injure à caractère raciste".

Des propos signalés sur Pharos et par la Licra

Un peu plus tôt, le Délégué interministériel à la lutte contre le racisme l'antisémitisme et la haine anti-LGBT (Dilcrah) Frédéric Potier avait annoncé un signalement auprès du parquet, après avoir recensé neuf passages qui constitueraient une incitation à la haine raciale. Il a aussi indiqué avoir signalé ces propos "aux fins d'enregistrement à la plateforme Pharos de l'office central lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication".

Dans des extraits de ses clips diffusés sur les réseaux sociaux et compilés notamment par la Licra, le rappeur déclare entre autres: "J'arrive déterminé comme Adolf dans les années 30", "tous les jours RAF (rien à foutre, ndlr) de la Shoah" ou bien encore "comme des banquiers suisses, tout pour la famille pour que mes enfants vivent comme des rentiers juifs".

Son dernier album, intitulé "LMF" ("La Menace Fantôme") et sorti le 11 septembre, a déjà été salué par de nombreux amateurs français. Un clip posté sur You Tube vendredi, "Freeze Corleone 667", affiche ainsi plus d'un million de vues, un succès qui suscite l'inquiétude de la Licra et de plusieurs élus et membres du gouvernement.

Sur Twitter, la Licra a estimé mercredi que "l'impunité (devait) cesser" et demandé à l'ensemble des acteurs dont les grandes plateformes de diffusion de musique en ligne de "prendre leurs responsabilités".

Appel à Facebook et Twitter de "ne pas diffuser ces immondices"

Dans un tweet publié dans la nuit de mercredi à jeudi, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin s'est indigné de propos "inqualifiables", appelant Facebook et Twitter "à ne pas diffuser ces immondices". Ce jeudi, le patron de Facebook France a annoncé sur BFM Business que les clips polémiques du rappeur Freeze Corleone avaient vocation à disparaître du réseau social.

De leur côté, une cinquantaine de députés LREM ont réclamé jeudi dans une tribune des sanctions. "Ce dernier fait ouvertement l'apologie du nazisme et l'éloge du terroriste Mollah Omar", ont écrit les élus parmi lesquels la députée des Yvelines, Aurore Bergé, l'ex-ministre de la Transition Ecologique, François de Rugy, ou la présidente de la commission des Lois, Yaël Braun-Pivet.

"Notre République ne peut accepter que la pseudo expression artistique puisse servir de prétexte aux appels à la haine ou à l'apologie du terrorisme", ont ajouté les députés. "Ne laissons plus rien passer".

"Des insultes antisémites qui donnent envie de vomir"

Le chef de file des députés LREM Christophe Castaner a lui aussi prévenu dans un tweet avoir saisi le procureur face à un clip "intolérable", tandis qu'à droite, le député des Alpes-Maritimes (LR) Eric Ciotti a dénoncé un "vrai prêcheur de haine" et appelé également les plateformes numériques à le radier et à interdire ses chansons de diffusion.

Interpellé dans la tribune des élus LREM, le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti s'est insurgé jeudi après-midi, dans l'hémicycle, contre ces paroles.

"L'imaginaire est le dernier refuge de la liberté et l'art est sans doute un espace formidable de liberté mais en aucune façon il ne peut être le paravent permettant en toute impunité d'exprimer la haine, ni l'apologie du nazisme (...) ni d'égrener des tombereaux d'insultes antisémites qui donnent envie de vomir", a-t-il déclaré.
"Ce clip vu par près de 5 millions de jeunes Français, alors que se déroule en ce moment même le procès de l'Hyper Cacher.... Je dis à tous les juifs de France, à tous nos concitoyens, à quel point le garde des Sceaux, le ministère de la justice, la Nation toute entière sont aujourd'hui à leurs côtés", a-t-il ajouté, avant d'être applaudi debout par l'ensemble des députés.
S. V. avec AFP