Interview

Australie : «Les animaux déjà menacés, comme le koala, disparaîtront localement»

L'Australie en feudossier
L'animal emblématique du pays a vu plus de 8 000 individus périr à cause des flammes. Bien d'autres espèces sont aussi directement touchées, comme l'explique Rebecca Keeble, directrice régionale Océanie du Fonds international pour la protection des animaux.
par Aude Massiot
publié le 5 janvier 2020 à 14h37

Les incendies monstres qui ravagent le sud-est de l'Australie depuis le mois de septembre ont des conséquences désastreuses sur le monde vivant. Rebecca Keeble, directrice régionale Océanie du Fonds international pour la protection des animaux (Ifaw) en détaille l'étendue et les possibles conséquences sur le long terme.

Des chercheurs de l’université de Sydney évaluent qu’un demi-milliard d’animaux sont morts à cause des incendies depuis septembre. Cette estimation vous semble-t-elle juste ?

Aussi choquants et incompréhensibles que peuvent sembler ces chiffres, il y a beaucoup de chance pour qu'ils soient prudents car ils ne concernent que l'Etat de Nouvelle-Galles du Sud, et seulement les mammifères, les oiseaux et les reptiles. Ils ne comprennent pas les insectes, les batraciens et les chauves-souris. Ces groupes ont vu des centaines de leurs membres mourir en conséquence directe de la vague de chaleur qui accompagne la saison des incendies. Beaucoup des animaux ont été tués directement par les feux, et d'autres succombent en raison du manque de nourriture, de refuges et de la prédation d'autres espèces. On estime que 8 000 koalas ont déjà été tués et plusieurs milliers de renards volants [un type de chauve-souris, ndlr] ont péri à cause de la canicule. Avec plus de 12 millions d'hectares de terrain brûlés à travers le pays, le véritable coût est insurmontable.

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Ces événements auront-ils des conséquences sur le long terme sur les écosystèmes ? Peuvent-ils provoquer la disparition de certaines espèces ?

D’après les écologues, les animaux déjà menacés, comme le koala, disparaîtront localement. Il est trop tôt pour donner avec certitude un pronostic à long terme. Sans aucun doute, ces incendies auront des conséquences sur les écosystèmes locaux pendant longtemps. L’Australie héberge entre 600 000 et 700 000 espèces, dont beaucoup sont uniques au pays. Cela comprend, par exemple, 84% de nos espèces végétales, 83% des mammifères et 45% d’oiseaux. La biodiversité australienne est depuis de nombreuses années menacées par les activités humaines, comme la chasse, l’urbanisation et maintenant le dérèglement climatique. Depuis la colonisation européenne, plus de 50 espèces animales et 60 espèces végétales ont disparu.

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Ces incendies sont-ils inhabituels pour la saison ? Peut-on identifier l’empreinte du changement climatique avec certitude ?

L’Australie est, malheureusement, habituée à subir une saison annuelle de feux. Celle de cette année a débuté bien plus tôt que la normale, dès septembre en Nouvelle-Galles du Sud et dans le Queensland. Ces incendies possèdent une échelle, une intensité et une imprévisibilité sans précédent. Ils sont tellement extrêmes qu’ils créent leurs propres phénomènes météorologiques avec des éclairs qui provoquent de nouveaux départs de feu. Le front des flammes s’étend sur près de 60 kilomètres à certains endroits, provoquant des évacuations de masse. L’état d’urgence a été déclaré pour la troisième fois cette saison en Nouvelle-Galles du Sud. La catastrophe a été exacerbée par la sécheresse, des sols extrêmement secs et des pics de chaleur. Tous ces facteurs sont aggravés par le dérèglement climatique.

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