Tract polémique: Écolo se défend de tout "racolage communautaire" et recadre deux élus
Un tract à visée communautaire met le feu à Écolo
- Publié le 16-05-2019 à 08h45
- Mis à jour le 16-05-2019 à 12h00
À dix jours des élections, la campagne électorale approche son point d’ébullition. Le tract politique y reste un outil précieux dans l’arsenal des partis. Notamment lorsqu’il s’agit de démarcher le citoyen indécis. Le moins que l’on puisse écrire, c’est que celui distribué mercredi par les écologistes sur le marché de Laeken, dans le nord de Bruxelles, n’a pas manqué de susciter la polémique. Lisez plutôt.
Sur le document en question, on découvre la position de chaque parti au sujet des libertés de culte à Bruxelles, singulièrement le culte musulman. Des thèmes y sont abordés : le port du foulard islamique, les jours de congé selon les convictions, le maintien du cours de religion et de morale ou encore l’abattage sans étourdissement à Bruxelles. Des cases vertes et rouges indiquent les positions des différents partis.
Distribué à l’initiative des élus bruxellois Zoé Genot et Ahmed Mouhssin, le tract se veut didactique et comparatif. Il est sourcé à partir d’articles de presse et du test électoral de La Libre Belgique.
Un tract exclusivement porté sur les libertés de culte
Plus précisément, on y lit qu’à la différence des autres partis, Écolo et le PTB sont en faveur de l’autorisation du port du foulard islamique pour le personnel au guichet de l’administration, de la possibilité pour les parents de pouvoir choisir un jour de congé selon leurs convictions ou de l’autorisation du port du foulard à l’école par les élèves. En outre, à l’inverse de Défi et du PS, Écolo, le PTB, le MR et le CDH sont pour le maintien de cours de religion et de morale dans le réseau officiel. Le tract précise qu’Écolo est en faveur de l’autorisation de l’abattage sans étourdissement dans le cadre de rites religieux à Bruxelles.
Au verso du document, un événement est proposé aux électeurs pour venir discuter de " la place du culte à Bruxelles" avec les candidats régionaux.
Fait notable : le tract vise exclusivement les mesures relatives à la liberté de culte dans la capitale. On notera ainsi l’absence totale de communication sur le climat, la mobilité ou encore le pouvoir d’achat, des thèmes pourtant martelés à l’envi depuis plusieurs semaines par le parti présidé par Zakia Khattabi et Jean-Marc Nollet.
Une manière de procéder qui a littéralement fait bondir certains ténors écologistes mercredi, à commencer par le député bruxellois sortant et tête de liste régionale à Bruxelles, Alain Maron. "Je suis furieux ! Ce n’est clairement pas notre façon de faire campagne. Nous misons sur la nuance et le dialogue, par sur les clichés ni le communautarisme. Ce modèle binaire (NdlR : via une réponse par oui ou non) ne laisse aucune place à la nuance. Or, le positionnement d’Écolo est bien plus nuancé que ce qui se ressort des tests électoraux et que ce qui se retrouve sur ce tract."
Dissonances entre l’état-major du parti et sa locale
Si tel est le cas, on peut alors légitimement se demander pourquoi l’état-major du parti assume ostensiblement dans la presse ce qu’il n’assume pas sur les marchés populaires de la capitale. C’est précisément la raison pour laquelle les deux élus à l’origine du tract n’ont pas estimé nécessaire de faire avaliser par la régionale bruxelloise du parti le contenu de leur document, avant de le diffuser. Ce dernier avait en effet déjà été avalisé par le service communication du parti puisqu’il reprend, texto, les réponses livrées par Écolo à La Libre.
De son côté, Alain Maron est catégorique : "Zoé Genot a fait une erreur d’appréciation importante, tant sur le fond que sur la forme." À l’origine, ce tract avait en fait été pensé par Zoé Genot et Ahmed Mouhssin en réponse aux propos tenus par le Parti socialiste quant au positionnement d’Écolo sur le port du foulard et que ces deux-là estiment mensongers.
"Racolage communautaire" et attaques en règle
La mise au jour de ce tract sur la twittosphère a fait l’effet d’une bombe. Sans surprise, la plupart des partis - sauf le PS et le PTB, qui sont restés globalement silencieux sur la question - y sont allés allègrement de leurs attaques en règle. "Ce tract est hallucinant, c’est franchement scandaleux et insensé de draguer ainsi la communauté musulmane en favorisant le repli sur soi et le communautarisme ", a commenté Georges Dallemagne, tête de liste fédérale CDH à Bruxelles. Pour le ministre MR Denis Ducarme, "Écolo affiche sans le moindre scrupule son communautarisme qui est totalement opposé aux principes de neutralité de l’État. C’est un moment central de la campagne car ce tract fait tomber les masques d’Écolo". De son côté, le Défi Emmanuel De Bock s’est fendu d’un commentaire du même acabit : "J ’hallucine. Les pratiques incroyables de racolage communautaire d’Écolo qui écume certains quartiers avec ce tract ? Dites-moi que je rêve !"
Mercredi en fin d’après-midi, la coprésidente Zakia Khattabi est à son tour sortie du bois en ces termes : " Nous avons toujours critiqué et dénoncé ce genre de pratique électorale chez les autres. Elles ne sont pas plus acceptables quand elles viennent des nôtres, même une seule fois c’est une de trop." La distribution du tract litigieux a été stoppée net.
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