Dans le nord du Brésil, une vague de violences alimentée par le chaos carcéral

Des membres des forces spéciales brésiliennes en faction après des heurts provoqués par la décision des autorités de transférer 200 prisonniers de la prison d'Alcacuz, près de Natal, vers d'autres établissements de l'état septentrional de Rio Grande do No

© ANDRESSA ANHOLETE

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Par AFP

Des attaques contre des bâtiments publics dans le Nord-est du Brésil, alimentées depuis les prisons par des narcotrafiquants: le président d'extrême droite Jair Bolsonaro fait face depuis début janvier à son premier défi sécuritaire, conséquence d'un système carcéral en plein déliquescence.

Plus de 400 membres de la Force nationale ont été dépêchés ces dernières semaines dans la ville de Fortaleza et dans le reste de l'Etat Ceara pour rétablir l'ordre et épauler la police locale, après une série d'attaques de gangs de narcotrafiquants contre des bâtiments publics, banques, autobus ou commissariats.

L'envoi de ces renforts avait été demandé par le gouverneur de gauche de l'Etat, et autorisé par le gouvernement du président Jair Bolsonaro, entré en fonction le 1er janvier et qui a promis une ligne dure contre la criminalité.

Le nombre d'attaques a depuis diminué, mais elles n'ont pas totalement cessé, et de nombreux habitants craignant pour leur vie préfèrent rester cloîtrés chez eux.

A l'origine de cette vague de violences, l'annonce par le gouvernement local d'un durcissement des conditions de détention, empêchant des membres de factions criminelles de contrôler divers trafics depuis les prisons.

En représailles, ces dernières se sont alliées pour orchestrer une quarantaine d'attaques à l'explosif ou d'incendies contre des bâtiments publics dans tout l'Etat, jusqu'à Fortaleza. Ces attaques ont semé la panique dans la population, en pleine saison touristique.

Cette flambée de violences "n'est que la face visible de la cocotte-minute qu'est le système pénitentiaire brésilien", estime Camila Nunes Dias, de l'Université fédérale d'ABC (Sao Paulo), spécialiste des groupes de narcotrafiquants brésiliens.

"Les prisons sont surpeuplées, sans les infrastructures nécessaires ni la gestion adéquate de l'Etat (...) Cela provoque des vagues de violences de plus en plus fréquentes, depuis l'intérieur jusqu'à l'extérieur des prisons", souligne-t-elle.

Le Brésil compte la troisième population carcérale au monde, avec 726.712 prisonniers en juin 2016, soit deux fois plus que la capacité officielle des prisons, selon des chiffres du ministère de la Justice.

Un système carcéral à bout de souffle

Les prisons du pays "sont aux mains des détenus eux-mêmes", en raison de l'incapacité de l'État à fournir les conditions de base telles que la nourriture, les vêtements et la surveillance, explique Camila Nunes Dias.

Pour Camila Nunes Dias, le système carcéral est à bout de souffle. Elle prône la mise en oeuvre de politiques visant à réduire à long terme la population carcérale.

"Il ne s'agit pas d'ouvrir les portes des prisons et libérer tous les détenus. Mais de mettre en place des politiques publiques, qui font défaut dans le pays, pour à court, moyen et long terme, réduire le nombre de détenus", défend-elle.

Opérations policières à Fortaleza, le 8 janvier dernier:

Brésil: opérations policières à Fortaleza, le 8 janvier dernier

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