Lors de la première phase de l’opération, près de 1500 propositions sont parvenues au jury : une très bonne "récolte", comme le confirme Michel Francard : "Les propositions étaient non seulement plus nombreuses que les autres années, mais de meilleure qualité. Elles ont évité le 'tout au Covid' et ont repéré les plus intéressantes innovations lexicales de ces derniers mois. Alors que je craignais une certaine disette lexicale, la septième édition du 'nouveau mot de l’année' confirme que cette opération est un excellent baromètre de la créativité des francophones".
La qualité des propositions a facilité la tâche du jury qui est parvenu assez facilement à se mettre d’accord sur les mots à retenir et sur ceux à écarter. "Pour l’essentiel, nous avons entériné des mots nouveaux plébiscités par de nombreux participants. Dans des domaines variés : crise sanitaire, évidemment, mais aussi relations sociales, consommation et même… grammaire ! Et en évitant une surreprésentation des emprunts à l’anglais, même si ceux-ci sont inévitables dans le contexte actuel", témoigne Michel Francard.
L’expression "Covid Safe Ticket" écartée
L’absence de certains termes pourrait étonner, comme celle par exemple de "Covid Safe Ticket", écarté au profit de "pass(e) sanitaire". "Nous avions le choix entre un anglicisme (partiellement déguisé) et un autre (clairement affiché)", explique Michel Francard.
"Même si 'Covid Safe Ticket', souvent abrégé en 'CST', présente l’atout d’être une dénomination propre à la Belgique, il n’a pas convaincu le jury en raison de sa forme opaque, pour pas dire trompeuse : de quoi est-on 'safe' avec ce ticket ? En outre, la mise en cause de sa légalité par la Justice et les critiques de certains scientifiques pourraient sonner le glas de ce laissez-passer sanitaire. Comme l’un des critères de sélection du nouveau mot de l’année est de privilégier des formes qui ne deviendront pas rapidement obsolètes, le CST est passé à la trappe."
La présence de certains termes pourrait, à l’inverse, provoquer quelques étonnements. Il en va ainsi de "iel", largement plébiscité par certains, mais honni par d’autres. "Depuis que l’opération ‘Nouveau mot de l’année' a été lancée, jamais une proposition n’a reçu autant de mentions. Bien sûr, cet engouement s’explique aisément par la polémique déclenchée, il y a quelques semaines, par l’introduction de ce nouveau pronom dans l’édition électronique du Robert. Sans ce coup de pouce, 'iel' n’aurait sans doute pas été plébiscité. Le jury a pris acte des réponses du public. Il sera intéressant de découvrir, à l’issue du vote sur les dix mots retenus, s’il s’agit d’un feu de paille ou d’une réelle appropriation du 'iel' par des francophones qui ne l’employaient pas auparavant."