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"Port du voile interdit" : une offre d’emploi pour du personnel de nettoyage dans une école d’Etterbeek jugée discriminatoire

L’offre d’emploi de Sainte-Geneviève a été supprimée du site d’Actiris.

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Par K. F.

"Port du voile interdit dans l’établissement". Le profil des personnes recherchées pour un poste de nettoyeur (se) et surveillant(e) d’enfants à l’école Sainte-Geneviève d’Etterbeek est clair. Si c’est une candidate, elle n’est pas autorisée à porter le voile islamique dans l’enceinte de l’école, si elle le porte habituellement. Une annonce diffusée sur le site Internet d’Actiris par le pouvoir organisateur de l’école, la Communauté éducative Sainte-Geneviève. Mais jugée discriminatoire selon Patrick Charlier, le directeur d’Unia, le centre interfédéral contre les discriminations, que la RTBF a contacté.

Le passage dans l’annonce qui a suscité des commentaires.
Le passage dans l’annonce qui a suscité des commentaires. © Actiris

L’annonce a été relayée par le site d’Actiris le 14 septembre dernier. Mais ce n’est que ce début de semaine qu’elle a été partagée sur les réseaux sociaux et accompagnée de commentaires. Ce n’est pas le fait qu’une école puisse interdire le port du voile qui pose question mais le fait qu’il n’y a que le port du voile qui est interdit, pas les autres signes religieux visibles.

Viser uniquement le port du voile est discriminatoire

"C’est une forme de discrimination directe à l’égard du voile", commente Patrick Charlier, d’Unia. "Une chose est d’avoir une politique de neutralité où on interdit tous les signes conventionnels quels qu’ils soient. Là, il y a des jurisprudences qui sont partagées. Mais certaines le justifient pour des écoles. Il n’empêche : viser directement et uniquement le port du voile est discriminatoire."

Interdire tous les signes : oui. Un seul : non. "La règle qui est adoptée dans un règlement de travail doit être motivée et justifiée. Un employeur qui interdit les signes convictionnels pourrait être interpellé, que ce soit par nous-même ou par d’autres en cas d’action judiciaire. La justification peut être pour des raisons de sécurité et dans une certaine mesure pour des raisons de neutralité comme le stipule un arrêt de la Cour européenne, pour autant que la politique de neutralité soit systématique et cohérente. C’est-à-dire : tous les signes et pas un seul."

Actiris ne peut pas interdire cette interdiction

Du côté d’Actiris, on admet que les services ont réceptionné ces derniers jours une série de "remarques" autour cette offre d’emploi. "Nous agissons comme relais pour les employeurs", indique Romain Adam, porte-parole de l’organisme régionale. "Actiris évolue aussi dans un cadre légal. Ce qui nous revient concernant cette annonce, c’est qu’à Bruxelles, nous ne pouvons pas interdire cette interdiction, si cette interdiction est motivée, dans ce cas-ci, par un règlement d’ordre intérieur au sein de l’établissement scolaire. Nous ne pouvons donc pas refuser la publication de cette offre."

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"Des équipes travaillent constamment au screening des offres d’emploi", afin d’éviter toute infraction, annonce farfelue ou offre d’emploi mensongère. "Nous ne faisons pas du copier-coller." L’annonce de Sainte-Geneviève a donc pu passer le filtre des services d’Actiris et être postée online.

Ceci étant, la pression des réseaux sociaux et le ciblage d’un signe religieux en particulier ont conduit Actiris a retiré l’offre de son site Internet ce lundi en milieu de matinée, "le temps de refaire le point sur le bien-fondé de cette annonce et de sa formulation d’un point de vue juridique". Contact devrait être pris avec l’établissement scolaire. Si aucune infraction n’est constatée, l’offre sera à nouveau diffusée. Dans le cas contraire, elle sera reformulée.

Malgré plusieurs appels, nous n’avons pas été en mesure de joindre la direction de la Communauté éducative Sainte-Geneviève à l’heure de la publication de cet article. Commentaire a par conséquent été sollicité auprès du Segec, le Secrétariat général de l’enseignement catholique. "Nous ne nous prononçons pas sur le cas d’une école dont nous ne savons pas ce qui est inscrit dans son règlement d’ordre intérieur", explique Christian Carpentier, porte-parole. "A notre niveau, nous recommandons aux écoles d’inscrire dans leur ROI l’interdiction de tout couvre-chef. Cela vaut pour les adultes comme pour les élèves et n’a rien de discriminatoire. Une simple casquette est déjà concernée…"

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Ce lundi après-midi, dans un tweet, le ministre bruxellois de l'Emploi Bernard Clerfayt (DéFI) a indiqué concernant ce dossier que la formulation choisie par l'école Sainte-Geneviève dans son offre d'emploi "est discriminante et doit être corrigée". Il ajoute: "L'école reste évidemment libre d'adopter une politique de neutralité, en l'indiquant dans son Règlement d'Ordre Intérieur."

 

QR du 03/06/2021: Signes convictionnels

Djemila Benhabib : "Jusqu où ira-t-on dans l'acceptation des signes convictionnels ?"

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