Afghanistan : "Il est temps d’adopter les règles des talibans"

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Par Wilson Fache, à Kaboul

En Afghanistan, les talibans semblent en voie de réinstaurer leur interprétation ultraradicale de la Charia avec un possible retour des châtiments corporels et des exécutions publiques. L’un des fondateurs du groupe a récemment déclaré que "couper les mains [des voleurs] est nécessaire pour la sécurité".

Les talibans vont-ils réinstaurer les punitions et châtiments qui avaient caractérisé leur premier régime, entre 1996 et 2001 ? A l’époque, les personnes accusées d’adultère étaient lapidées à mort, la main des voleurs était coupée, les hommes aux barbes trop courtes étaient fouettés, tout comme les femmes considérées comme pas assez couvertes.

Nik Mohammed, 26 ans, tient un salon de coiffure dans le quartier de Shahr-e Naw, à Kaboul. Le jeune homme redoute un bond en arrière de 20 ans : "Dans le passé, ils étaient très agressifs avec les gens. Ils avaient des règles arbitraires et personne n’avait le courage de s’élever contre eux. Sous le gouvernement précédent, ils étaient peut-être corrompus, mais au moins les gens avaient le droit de faire entendre leur voix".

Il craint également que les talibans interdisent à nouveau aux hommes de se raser. "Si les barbes longues et ce genre de règles deviennent obligatoires, que ferons-nous ici ? Nous allons perdre notre travail", soupire ce père de deux enfants en passant un peigne dans la barbe d’un client.

Le mollah Nooruddin Turabi, ancien chef notoire de la police religieuse des talibans et désormais responsable des prisons, a déclaré à l’Associated Press que les punitions extrêmes telles que les exécutions et les amputations reprendraient en Afghanistan. Il a affirmé que la règle selon laquelle les voleurs doivent avoir la main coupée était "nécessaire pour la sécurité".

Corps ensanglanté pendu à une grue

Le sexagénaire, membre fondateur de mouvement islamiste, a toutefois précisé que ces punitions ne seraient pas infligées en public, comme elles l’étaient sous le précédent régime taliban dans les années 1990. Pourtant, un homme accusé d’avoir participé à un kidnapping a été abattu et exhibé à la vue de tous aujourd’hui dans la ville d’Herat. Son corps ensanglanté a été pendu à une grue sur la place principale de la ville, devant un public médusé.

Depuis le retour au pouvoir des talibans le 15 août, une partie de la population vit dans la détresse. La scolarité des filles a été suspendue, des exécutions sommaires ont été rapportées, l’économie est en berne et des responsables talibans multiplient les déclarations à glacer le sang.

"Nous voulons que les talibans aient un bon comportement avec la population pour que les gens restent dans le pays et que ceux qui ont fui puissent revenir", estime Lal Mohammed, 21 ans, vendeur dans une petite boulangerie de la capitale afghane. "Nous ne voulons pas de nouvelles règles et réglementations. Surtout, nous souhaitons la paix et une bonne économie, que les gens n’aient pas à se soucier de leur avenir".

Mais une partie de la population se félicite tout de même du retour des talibans et de leur interprétation ultraradicale des réglementations islamiques, à l’instar de Amjad Jawed, 21 ans, qui vend du maïs grillé dans la rue. "La main d’un voleur doit être coupée, une femme adultère doit être lapidée. Ce sont les lois de l’Islam. Nous sommes musulmans et ce sont nos lois", assure le jeune homme. "Les talibans se battent depuis vingt ans et leurs règles doivent être adoptées. Avant, c’était les règles du gouvernement précédent. Maintenant, il est temps d’adopter les règles des talibans".

Journal télévisé du 25/09/21

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