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"Les émissions de gaz vont dans la mauvaise direction": la hausse de température pourrait atteindre 2,7°C

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Par Quentin Warlop

Six semaines. Il ne reste que six semaines avant la COP26 prévue en Ecosse. L’ONU alerte et publie un nouveau rapport sur un réchauffement climatique. On y apprend que les engagements déposés par les États signataires de l'accord de Paris mènent le monde vers un réchauffement "catastrophique" de 2,7 °C, très loin de l'objectif de 1,5 °C espéré pour limiter les retombées destructrices du réchauffement climatique.  

L'Accord de Paris visait à limiter ce réchauffement bien en-deçà de 2 °C par rapport à l'ère pré-industrielle, si possible 1,5 °C. Mais "l'échec à respecter cet objectif se mesurera à l'aune du nombre de morts et de moyens de subsistances détruits", a insisté Antonio Guterres, le secrétaire général de l’ONU, appelant tous les gouvernements à proposer des engagements plus ambitieux.

En vertu de l'Accord de Paris, signé en 2015, chaque pays devait réviser d'ici fin 2020 sa "contribution déterminée au niveau national" (NDC). Mais au 30 juillet, seuls 113 pays représentant moins de la moitié des émissions mondiales de gaz à effet de serre (49 %) avaient effectivement déposé leurs engagements révisés. Avec ces nouvelles promesses, les émissions de ce groupe de 113 pays, dont les États-Unis et l'Union européenne (UE), seraient réduites de 12 % en 2030 par rapport à 2010.

Patricia Espinosa, secrétaire exécutive de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, aux côtés d'Antonio Guterres, le secrétaire général des Nations unies.
Patricia Espinosa, secrétaire exécutive de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, aux côtés d'Antonio Guterres, le secrétaire général des Nations unies. © AFP OR LICENSORS

+ 2,7° d’ici la fin du siècle ?

Une "lueur d'espoir" qui n'éclipse toutefois pas le côté "sombre" de ce tableau, a relevé la responsable climat de l'ONU, Patricia Espinosa. "Dans l'ensemble, les chiffres des émissions de gaz à effet de serre vont dans la mauvaise direction", a-t-elle déploré.

En prenant en compte l'ensemble des NDC – révisées ou non – des 191 pays signataires, les émissions devraient augmenter de 16 % en 2030 par rapport à 2010, alors qu'il faudrait les réduire de 40 % d'ici 2030 pour rester sous 1,5 °C, ou de 25 % pour 2 °C. Une augmentation "considérable" qui "pourrait entraîner une hausse de la température d'environ 2,7 °C d'ici la fin du siècle" alors que chaque fraction de degré supplémentaire multiplie les conséquences dramatiques.

« La Cop26 doit être un succès ! »

Le dernier rapport des scientifiques du GIEC publié en Août mettait déjà en garde contre un risque d'atteindre le seuil de 1,5 °C autour de 2030, dix ans plus tôt qu'estimé, menaçant l'humanité de nouveaux désastres sans précédent. Dans ce contexte, "la COP26 doit être un succès", a martelé Patricia Espinosa, appelant les États à négocier en étant "poussés pas uniquement par le désir légitime de protection de leur intérêt national mais aussi par l'objectif de contribuer au bien-être de l'humanité".

Alors qu'une dernière évaluation sera réalisée d'ici fin octobre, elle espère également de nouveaux engagements. "Sans l'action de tous les pays, et notamment des plus grandes économies, les efforts risquent d'être vains", a commenté de son côté le président de la COP26, Alok Sharma.

Pour le professeur de climatologie Jean-Pascal van Ypersele: "On a perdu un an avec le Coronavirus. L’urgence est encore plus grande qu’avant."
Pour le professeur de climatologie Jean-Pascal van Ypersele: "On a perdu un an avec le Coronavirus. L’urgence est encore plus grande qu’avant." © Belga

« On ne négocie pas avec les lois de la physique »

Pour Jean-Pascal van Ypersele, ancien vice-président du GIEC : "La situation ne s’améliore pas. On a perdu un an avec le Coronavirus. L’urgence est encore plus grande qu’avant. L’atmosphère ne connait pas les discours mais que les actes et les lois de la physique avec lesquelles on ne négocie pas."

La Cop26 pointe le bout de son nez et avec elle, des espoirs mesurés pour le professeur de climatologie à l’UCLouvain : "Il y a toujours un espoir que l’humanité se ressaisisse, que les discours deviennent réalité, que les arrangements avec les chiffres disparaissent. Nous devons maintenir l’habitabilité de la seule planète habitable du système solaire. "   

Et le Belge de rajouter : " La reprise des émissions a été forte en Chine et aux Etats-Unis mais aussi en Europe. On verra très probablement que les émissions de 2021 montrent une augmentation par rapport à celles de 2019, d’avant-covid. "

La Chine dans le viseur

L'attention est notamment tournée vers la Chine, responsable de plus d'un quart des émissions mondiales de CO2.

Le président Xi Jinping a annoncé il y a un an viser la neutralité carbone d'ici 2060 et un pic d'émissions "autour de 2030", mais sans réviser sa NDC. Au-delà de la Chine, tout le G20 est dans le collimateur des défenseurs du climat.

Neutralité climatique en Europe en 2050 ?

De leur côté, hier, les pays du sud de l'UE ont réitéré vendredi à Athènes "leur ferme engagement" à mettre en œuvre l'Accord de Paris de 2015, visant à limiter le réchauffement climatique à 1,5°C. "Maintenant plus que jamais, il est nécessaire de s'attaquer à la crise climatique et environnementale qui s'intensifie", ont exhorté les neuf pays méditerranéens au sommet d'Athènes. Dans leur déclaration commune, les neuf dirigeants réaffirment en outre leur "engagement d'atteindre la neutralité climatique d'ici 2050" en Europe.

Présent à Athènes, le président du Conseil européen Charles Michel a estimé que c'était "la seule solution". "Nous voyons tous que le changement climatique affecte lourdement la région méditerranéenne et nous devons trouver des solutions", a également estimé sur la chaîne EBS la présidente de la commission européenne Ursula von der Leyen, venue à Athènes

"Le danger est commun"

La Grèce a été sévèrement frappée par les feux de forêt, qui ont dévasté plus de 100.000 hectares de son territoire cet été. Mais les températures caniculaires ont également favorisé d'importants incendies en Espagne, en Italie, en Croatie, en France et à Chypre.

Le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis, qui présidait le sommet, a rappelé que "les feux dévastateurs de cet été qui ont frappé la Grèce, l'Italie et Chypre, n'ont épargné aucun pays de Méditerranée, pendant que le Nord de l'Europe était frappé par des inondations destructrices. Alors que le danger est commun, notre défense doit l'être aussi.", a-t-il exhorté.

A l'initiative d'Athènes, le président français Emmanuel Macron, les Premiers ministres espagnol Pedro Sanchez et italien Mario Draghi ont signé, avec leurs homologues de Chypre, Malte, Slovénie, Croatie et du Portugal, une déclaration "pour atteindre un résultat ambitieux lors de la COP26" qui se tiendra à Glasgow, en Ecosse, du lundi 1er au vendredi 12 novembre.

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