Belgique

Que reste-t-il à faire avant le procès des attentats du 22 mars 2016 ?

Une des salles d’audience qui servira au procès des attentats du 22 mars dans le bâtiment Justitia à Haren

© Belga photo Nicolas Maeterlinck

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Par Melanie Joris

Hier, la chambre des mises en accusation a rendu son arrêt concernant les dix inculpés dans le dossier des attentats du 22 mars 2016. Ils sont tous renvoyés devant la cour d’assises de Bruxelles. Il s’agissait de la dernière étape avant le grand procès qui s’ouvrira en septembre 2022. D’ici là, que reste-t-il à faire ?

Composer la cour d’assises

D’abord, il faut constituer ce qu’on appelle le siège. Il s’agit du ou de la présidente de la cour d’assises ainsi que ses deux assesseurs. Le président vient de la cour d’appel tandis que les assesseurs viennent du tribunal de première instance. Comme ce procès se déroulera à Bruxelles, les assesseurs peuvent venir du tribunal de première instance de Bruxelles et de Nivelles.

Dans le cas des gros procès, chaque personne clé est doublée pour éviter que le procès ne doive recommencer pour cause de maladie. Ce n’est pas inscrit dans la loi, mais ce principe est consacré par la jurisprudence. La condition essentielle est que ces doublures assistent à l’ensemble des débats.

On se prépare à une année difficile

Ces magistrats seront immobilisés pendant 6 à 9 mois. Certaines sources nous annoncent déjà : "On se prépare à une année difficile. Les magistrats à Bruxelles comme à Nivelles ne sont pas très nombreux. Ce procès aura un impact sur les autres chambres".

Cette préoccupation a d’ailleurs été pointée par le procureur général Johan Delmulle dans son discours de rentrée le 1er septembre 2021 : "Des sessions d’assises hors normes sont planifiées ou en voie de l’être. Elles priveront les chambres correctionnelles de plusieurs de leurs membres pendant de longues périodes".

Au-delà du siège, le parquet prévoit lui aussi une doublure pour l’avocat général. Une différence toutefois : le parquet étant considéré comme un et indivisible, cette doublure ne devra pas assister à l’ensemble des débats.

Constituer un jury populaire

La première étape pour constituer un jury, c’est d’envoyer des convocations chez les citoyens au moins vingt jours avant le début du procès. En principe, au moins soixante convocations sont envoyées.

Lors du dernier grand procès d’assises pour terrorisme, le procès de Mehdi Nemmouche, l'auteur de l'attentat contre le Musée juif de Belgique, deux cents convocations avaient été envoyées. Dans le cadre du procès du 22 mars, ce chiffre sera probablement encore gonflé pour s’assurer un nombre suffisant de jurés. Il y a d’ailleurs eu récemment un exemple de cette importance d’envoyer suffisamment de convocations. Un procès a dû être ajourné à une date indéterminée car il n'y avait pas assez de jurés masculins pour constituer le jury.  

Ensuite, toutes les personnes qui ont reçu une convocation vont devoir se présenter à la cour. Elles peuvent avancer des raisons qui les empêcheraient d’être juré, de même que les avocats et le parquet peuvent demander à récuser un candidat.

Une fois que la liste de jurés potentiels est constituée, tous les noms sont placés dans une urne pour le tirage au sort. Le jury populaire est finalement composé de 12 jurés effectifs et jusqu’à 24 jurés suppléants.

Du côté des jurés suppléants, la Constitution a été modifiée via la loi du 31 juillet 2020. Auparavant, le nombre de suppléants était limité à 12. Dans le cadre du procès de Mehdi Nemmouche, cela avait donné des sueurs froides à la cour. En effet, au bout de neuf semaines de procès, sept jurés avaient été récusés pour différents motifs. Et s’il n’y a plus assez de jurés, le procès doit s’arrêter et recommencer à la case départ. Il s’agirait, dans le cadre du procès des attentats du 22 mars, d’un énorme gâchis vu les moyens dépensés.

Le rôle des jurés suppléants est tout aussi important que celui des jurés effectifs. En cas de maladie ou d'imprévu qui empêcherait un juré effectif d'assister à l'audience, c'est un juré suppléant qui devra prendre la relève au pied levé. C'est la raison pour laquelle les jurés suppléants doivent assister à l’ensemble des débats.

Derniers aménagements dans le Justitia

Des travaux sont encore nécessaires avant que le Justitia ne soit tout à fait opérationnel. La première phase de travaux a déjà eu lieu. Elle a permis d’adapter le bâtiment de l’OTAN aux besoins de la justice. Une grande salle d’audience a été créée ainsi que deux salles relais. Ces installations ont déjà pu être rodées puisque plusieurs audiences de la chambre du conseil et de la chambre des mises en accusation ont déjà eu lieu à Haren ainsi que certains procès comme celui sur une vaste escroquerie dans le milieu des voitures d’occasion

Il faut, à présent, adapter la plus grande salle d’audience aux besoins d’un procès pour terrorisme. Il s’agit d’adaptations en termes de circulation, de sécurité, mais aussi pour permettre la traduction simultanée.

Par ailleurs, huit autres salles sont prévues pour accueillir les parties civiles. Dans ces salles, une retransmission audio et vidéo sera disponible. Une salle de presse et une cafétéria doivent venir compléter le décor. Ces travaux devraient être réalisés dans les prochaines semaines.

Quant aux installations de sécurité, l’entrée du bâtiment est équipée de deux portiques détecteurs de métaux. Au palais de justice de Paris, qui accueille en ce moment le procès des attentats du 13 novembre, il y en a une dizaine. Ce qui permet de fluidifier les entrées.

Certains peuvent se demander pourquoi ce procès ne se tiendra pas dans l’habituel palais de justice de la place Poelart. De nombreuses critiques émanant des différentes parties ont également déjà été formulées. La principale porte sur le fait que ce bâtiment est loin et excentré.

Mais le palais de justice de la place Poelaert est trop petit pour accueillir ce procès historique. À l’heure actuelle, 960 personnes se sont déjà constituées parties civiles. Autant de personnes qui doivent pouvoir assister au procès. Ces dernières années, plusieurs scénarios ont été étudiés par un groupe de travail. Le choix s’est finalement porté sur l’ancien bâtiment de l’OTAN à Haren, rebaptisé le Justitia.

Ces travaux ont coûté 24 millions d’euros à la Belgique. 

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