Belgique

Commission parlementaire sur les inondations : "Le lundi 12 juillet à 0h00, on savait qu’il y aurait des inondations"

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Par Jean-François Noulet, avec Belga

Le lundi 12 juillet à 00h00, "tous les modèles étaient d’accord. On savait qu’on allait être confronté à un épisode pluvieux extrême dans les Ardennes" et qu’il y aurait des inondations, a affirmé Xavier Fettweis, le directeur du laboratoire de climatologie de l’ULiège, lors de son audition, jeudi, devant la commission d’enquête parlementaire sur les inondations de la mi-juillet.

"Il est tombé en quelques jours deux fois ce qu’il tombe en moyenne sur tout le mois de juillet", a-t-il expliqué. Le lundi, tous les modèles prédisaient cet épisode pluvieux très important.

Xavier Fettweis a comparé la situation rencontrée à la mi-juillet avec ce qui s’est produit en septembre 1998. A cette époque, des précipitations de l’ordre de 100 mm avaient provoqué des inondations.

Dès lors, alors que les modèles de prévisions s’attendaient, dès le 10 juillet à minuit à ce qu’il tombe plus de 100 mm de pluie dans les jours à venir, on pouvait s’attendre aussi à des inondations.

Pourquoi aucune alerte rouge n’a-t-elle été émise par l’IRM ?

Selon Xavier Fettweis, la raison pour laquelle l’IRM n’a pas lancé d’alerte rouge aux inondations avant le 14 juillet à 9h est à aller chercher dans les échéances d’alerte de l’IRM. "On peut faire une alerte jaune 48 heures avant l’événement, une alerte orange 24 heures avant l’événement et une alerte rouge 12 heures avant l’événement", a expliqué le directeur du laboratoire de climatologie de l’ULiège.

Il aura donc finalement fallu attendre le 14 juillet à 09h00 pour qu’une alerte rouge soit décrétée, même si des prévisions de précipitations importantes, de l’ordre de 100 mm étaient faites dès le samedi 10 juillet à midi et des prévisions de précipitations de 150 mm dès le dimanche 11 à minuit.

Le réchauffement climatique en cause

"Sans le réchauffement climatique, on n’aurait pas connu un épisode d’une telle intensité", a poursuivi Xavier Fettweis devant la commission du Parlement wallon. En ralentissant la dynamique atmosphérique qui empêche l’évacuation des zones de pluie et en provoquant des étés plus chauds, le réchauffement climatique favorise en effet les événements extrêmes, a-t-il détaillé.

Plus il fait chaud, plus il y a de l’humidité dans l’atmosphère. Un degré de réchauffement entraîne une augmentation de 7% de l’humidité dans l’atmosphère.

Deuxième conséquence du réchauffement : le ralentissement de la dynamique atmosphérique. Normalement, la différence de température entre les pôles et l’équateur génère des courants d’air qui font circuler les masses d’air. Avec le réchauffement des pôles, ces courants d’air sont moins présents. En conséquence, les événements climatiques, sécheresse ou pluie, restent plus longtemps sur place. En juillet, la pluie s’est abattue pendant trois jours…

Des épisodes pluvieux de cette importance sont à prévoir dans les 10 à 30 ans à venir

"Les différents scénarios présentés par le GIEC suggèrent une multiplication de ce type d’intempéries dans les 10 à 30 ans à venir", a estimé Xavier Fettweis. Trois modèles climatiques sur quatre suggèrent en effet des événements similaires à celui de juillet dernier dans les années 2030.

Plus on ira vers la fin du siècle, moins ces épisodes très pluvieux seront fréquents l’été. Car "après, les étés seront trop secs et on sera confronté à d’autres problèmes, dont des canicules et des feux de forêt", a encore estimé le climatologue.

Fallait-il vider le barrage d’Eupen ?

Autre question épineuse, à côté de celle des prévisions météorologiques : fallait-il vider le barrage d’Eupen ? Interrogé par plusieurs parlementaires sur le sujet, Xavier Fettweis s’est montré réservé. "En septembre 1998, les barrages avaient été vidés au cours des intempéries et il y avait quand même eu des inondations. Ici, vider le barrage d’Eupen aurait peut-être permis de réduire les dégâts mais pas dans le bas de la vallée de la Vesdre, ni dans la vallée de la Hoëgne", a-t-il souligné. "Il aurait été quasiment impossible de vider le barrage d’Eupen car il aurait fallu mettre la Vesdre en crue", a encore indiqué Xavier Fettweis selon qui il faudrait par contre réfléchir, pour le futur, "à dévier la Hoëgne vers un barrage et à permettre aux barrages de communiquer entre eux". "Dans les décennies à venir, la sécheresse sera un plus gros problème que les inondations. On aura besoin d’eau" et donc de barrages, a-t-il conclu.

Au terme de cette audition, c’est Aurore Degré, spécialiste de la physique des sols à Gembloux Agro-Bio Tech, qui a éclairé les parlementaires régionaux sur les échanges entre l’eau et le sol, et notamment sur le ruissellement.
 

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