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Espagne : des dizaines de villages en manque d’eau potable à cause de la pollution

Un homme transporte des bouteilles d’eau minérale dans une brouette à Lastras de Cuellar le 28 juin 2021.

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Par RTBF avec agence

Dans le village espagnol de Lastras de Cuéllar, les nitrates et l’arsenic rendent depuis six ans l’eau imbuvable pour les habitants. Alors, chaque lundi, ils défilent sur la place principale pour récupérer des packs d’eau financés en partie par la mairie. 63 communes sont concernées.

De l’eau en bouteille pour préparer un café

A Lastras, Alejandro Martín, 17 ans, aide son grand-père de 95 ans à ramener la précieuse eau minérale avant de la verser dans une casserole pour préparer un café.

"Pour moi, cela n’a aucun sens : devoir aller chercher des bouteilles chaque semaine, alors que nous avons des robinets et de l’eau courante à la maison. C’est assez grave. Parce que nous gaspillons de l’argent en achetant des bouteilles en plastique. Ça coûte cher et nous devons ensuite les ramener (à la maison), et dans notre cas, nous sommes jeunes, mais la majorité des habitants de ce village sont âgés", s’indigne Alejandro.

Dehors, des bouquets et des guirlandes de bouteilles en plastique sont suspendus aux balcons où des banderoles exigent l’accès à l’eau potable. "Ce n’est pas normal au XXIe siècle", s’emporte Mercedes Rodríguez, 41 ans, membre d’un collectif d’habitants.

"De l’arsenic et des nitrates apparaissent dans l’aquifère. On nous a dit que c’est à cause du filtrage des pluies, du manque de pluie, de la consommation humaine… Et nous avons également eu un réseau de drainage déficient parce que nous avions un réseau de tuyaux en plomb dans le village, et ces tuyaux fuyaient et donc on perdait plus de débit qu’on en consommait.", explique Mercedes Rodriguez.

Sécheresse et pollution agricole

Selon un rapport du ministère espagnol de la Transition écologique publié fin 2020, les excès de nitrates dans les sources d’eau restent d’abord une "conséquence de l’usage des fertilisants dans l’activité agricole". 

Ici, c’est déjà "près de 20.000 porcs pour 50 habitants"

A Lierta, village de la région d’Aragon (nord-est), privé d’eau potable depuis 2018 à cause des nitrates, les habitants se battent contre un projet d’installation d’une nouvelle exploitation de 3000 truies. Ici, c’est déjà "près de 20.000 porcs pour 50 habitants", fustige Bernard Más, 68 ans, membre de l’association d’habitants qui vient d’obtenir la suspension du projet pour un an au dernier conseil municipal.

Dans le pays de la charcuterie, "l’élevage intensif, les maxi-exploitations sont un réel problème" pour la qualité de l’eau dans les zones où elles sont implantées, à cause des rejets de purins, estime Luis Babiano, président de l’Association espagnole des opérateurs publics de distribution et d’assainissement de l’eau.

Ultimatum européen

Une situation qui concerne 63 communes espagnoles, et qui inquiète jusqu’à Bruxelles, où la Commission européenne a lancé un ultimatum à l’Espagne en 2020 pour qu’elle améliore son contrôle de la qualité des eaux, sous peine de lourdes amendes.

A terme, la sécheresse, qui pourrait s’aggraver en Espagne en raison du changement climatique, pourrait aussi mettre en péril la qualité de l’eau dans le pays. Car si la quantité d’eau diminue et que celle de produits nocifs ne baisse pas, la proportion de ceux-ci augmente dans l’eau, conclut Luis Babiano.

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