Belgique

"Jour du Dépassement" mondial : ce 29 juillet, nous aurons épuisé les ressources naturelles pour 2021

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Par Kamel Azzouz

Dès ce jeudi 29 juillet, la population mondiale entamera le capital naturel de notre planète. Calculé par l’ONG Global Footprint Network, le jour du dépassement planétaire (Earth Overshoot Day) correspond au jour où l’humanité aura utilisé autant de ressources biologiques que ce que la Terre peut régénérer en une année.

Concrètement, il faudrait l’équivalent de 1,7 planète Terre pour que la population mondiale puisse subvenir à ses besoins en 2021.

L’humanité vit "à crédit"

A partir de ce 29 juillet, nous vivrons donc à crédit durant un peu plus de cinq mois. C’est quatre semaines plus tôt qu’en 2020, et exactement la même date qu’en 2019. L’année dernière, nous avons connu une baisse historique de l’empreinte écologique totale (-9,3%).

Le confinement et les mesures prises pour lutter contre la pandémie ont provoqué une forte diminution des émissions de CO2 au premier semestre 2020 pour repartir à la hausse durant la seconde moitié de l’année. Aujourd’hui, l’impact de la pression humaine sur les ressources naturelles revient au niveau observé avant la crise sanitaire.

Le Global Footprint Network révèle cette année que l’empreinte carbone mondiale avait augmenté de 6,6% par rapport à 2020.

Béatrice Wedeux, chargée de plaidoyer au WWF-Belgique, souligne aussi l’impact de la déforestation sur la capacité de la Terre à régénérer ses ressources : "Rien qu’au Brésil, 1,1 million d’hectares de forêt ont été détruits en 2020. C’est un record depuis 2008. Cette tendance ne faiblit pas car la déforestation en Amazonie a augmenté de 17% au premier semestre 2021. Par exemple, l’Amazonie du sud-est émet maintenant plus de carbone qu’elle n’en stocke dû à la déforestation et aux incendies dans la région. Globalement, On observe une diminution de 0,5% de la biocapacité forestière mondiale. Il s’agit de la capacité des forêts à produire des ressources naturelles et à stocker du carbone. Cette baisse est due en grande partie au pic de déforestation enregistré en Amazonie. Tout cela a comme conséquences un dérèglement climatique, une surexploitation des écosystèmes, et une perte de la biodiversité."

Si tout le monde vivait comme nous, il nous faudrait quatre planètes !

L’Union européenne est le deuxième importateur mondial de produits associés à la déforestation, derrière la Chine. Un récent rapport du WWF montre que la consommation des Européens est un moteur clef de la déforestation tropicale et de la destruction d’écosystèmes dans le monde.

Béatrice Wedeux nous explique que la Belgique n’est pas en reste tant au niveau européen que mondial : "Parmi les pays européens, la Belgique est le sixième plus gros utilisateur de produits associés à la déforestation. Par personne, cela correspond à 14 mètres carrés de déforestation par habitant et par an. On a une empreinte beaucoup plus élevée que la moyenne mondiale. Si tout le monde vivait comme nous, il nous faudrait quatre planètes ! Nous avons en Belgique une biocapacité très restreinte et nous comblons le déficit écologique en 'exportant' une partie de notre empreinte écologique. En d’autres mots, en 'important' des produits issus d’écosystèmes et de la destruction d’écosystèmes à l’autre bout du monde".

C’est sans compter sur le fait que nous émettons beaucoup de gaz à effet de serre. Les principaux secteurs sont l’industrie, les transports et les bâtiments (chauffage). La Belgique est classée rouge par Le Global Footprint Network qui estime le "Jour du dépassement" au 30 mars chez nous.

Comment ce "Jour du Dépassement" est-il calculé ?

Pour ce faire, le Global Footprint Network se base sur 3 millions de données statistiques issues de 200 pays et publiées par les Nations-Unies. L’ONG divise la capacité de régénération de la Terre (biocapacité) par la consommation annuelle de l’humanité en ressources naturelles (empreinte écologique).

Tout comme un relevé bancaire permet de comparer les revenus et les dépenses, le Global Footprint Network mesure la demande des ressources et de services d’une population et "l’offre" des écosystèmes.

Béatrice Wedeux précise : "Les deux mesures sont exprimées en hectares globaux, c’est-à-dire en hectares normalisés et comparables au niveau mondial, avec une productivité moyenne mondiale. Un hectare équivaut à 10.000 mètres carrés. Ensuite, on compare l’empreinte écologique de la population mondiale à la biocapacité des écosystèmes mondiaux. Quand la demande d’actifs écologiques de la population mondiale est supérieure à l’offre, nous entrons en déficit écologique. On va alors puiser dans des stocks qui ne vont pas pouvoir se renouveler de manière soutenable (p.ex. surpêche, déforestation) et/ou on va émettre du dioxyde de carbone dans l’atmosphère."

 

Comment agir et pour quel impact ?

Au niveau mondial, le WWF estime qu’il faut réduire de moitié l’empreinte écologique de notre consommation et de production, ainsi que les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030. Cela retarderait le Jour de dépassement planétaire de 93 jours.

À noter que pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris il faudrait mondialement atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Béatrice Wedeux rappelle quelques actions et solutions qui auraient également un impact significatif : "Si nous réduisons de moitié la consommation de viande en remplaçant ces calories par un régime végétarien, nous déplacerions le Jour du dépassement de 17 jours. Si nous voulons agir contre le changement climatique, nous devons cesser de détruire les écosystèmes essentiels à la régulation du climat. Une opportunité inédite se présente cette année puisque la Commission européenne devrait présenter avant la fin de l’année un projet de législation visant à empêcher la mise sur le marché de produits issus de la déforestation. Nous devons restaurer les écosystèmes, qui peuvent nous aider à nous adapter aux chocs climatiques à venir, qui favorisent un retour de la biodiversité, et qui en plus stockent du carbone et donc contribuent à l’atténuation du changement climatique."

Pour retarder le Jour du dépassement planétaire et atteindre ces objectifs, le WWF Belgique insiste sur le fait qu’il faut des solutions structurelles au niveau des États et des entreprises, sans oublier une prise de conscience collective de tout un chacun.

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