Travailler à domicile ou près de chez soi, une option durable pour des milliers de fonctionnaires fédéraux

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Par Patrick Michalle

Le temps où les partisans du télétravail étaient regardés comme de doux rêveurs est bel et bien révolu. "Nécessité fait loi ", la crise du Covid 19 a fini par lever tous les obstacles mis en avant par ceux qui résistaient à l’idée d’autoriser leur personnel à travailler en dehors du périmètre habituel du lieu de travail.

Après des mois de pratiques contraintes, les premiers constats laissent apparaître des résultats plutôt positifs. En témoigne une étude réalisée en début d’année auprès de 12.000 fonctionnaires fédéraux et qui démontre que le télétravail n’a pas eu d’impact négatif sur le plan de la productivité, c’est même le contraire d’après les croisements de données.

La plupart des travailleurs consultés affirment apprécier le télétravail et se disent prêts à continuer mais à condition de conserver un lien régulier avec leurs collègues et de disposer des outils nécessaires comme un siège ergonomique et un second écran.

Globalement si l’on parle de répartitions différentes des séquences domicile/lieu de travail, la moyenne reviendrait à un partage 50/50 entre les deux univers. La ministre de la fonction publique Petra De Sutter a déjà clairement indiqué qu’elle était en faveur du télétravail en autorisant les fonctionnaires à en bénéficier au moins deux jours par semaine.

Réduire les temps de déplacements, changer le rapport à l’espace et à la mobilité

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Du coté des gestionnaires de département, une même satisfaction apparaît à l’égard du télétravail. Cette réorganisation forcée pour cause de Covid a permis de mieux répartir les espaces de bureau, permettant de gagner en confort pour ceux qui doivent conserver du présentiel au siège.

Mais sur le long terme ce sont les gains potentiels que l’Etat fédéral pourrait réaliser en réduisant ces mêmes surfaces qui sont alléchants. Différents chiffres circulent et seront fonction de la capacité de renégocier les baux consentis avec le secteur privé mais on parle en dizaines de millions d’euros chaque année d’économie ainsi réalisées.

On peut envisager différemment la vie en récupérant du temps qu’on ne passe plus dans les trajets

Pour Mathieu Michel, secrétaire d’Etat chargé de la Régie des bâtiments, il faut saisir cette opportunité pour repenser tout le redéploiement de l’administration : "cette situation nouvelle a changé la manière dont on aborde la question de la présence au travail et à domicile, on peut envisager différemment la vie en récupérant du temps qu’on ne passe plus dans les trajets".

A cela s’ajoute le changement induit par une présence plus longue au domicile : "Le rapport à la proximité change car le télétravail modifie aussi le rapport à son quartier où l’on fait désormais plus souvent ses courses". Pour le secrétaire d’Etat, tout cela devrait modifier le rapport au travail et à la mobilité pour le personnel mais aussi pour les employeurs "qui doivent désormais concevoir autrement la gestion des espaces de travail".

Des réductions importantes de bureaux à Bruxelles

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Bruxelles © Belga

Et c’est ici qu’une réforme sur les rails dans l’administration publique a refait surface à la faveur de la crise sanitaire. Il existe désormais une fenêtre d’opportunité exceptionnelle pour la réaliser sans trop de résistances. Elle va se traduire par une série de changements systémiques dont il est encore difficile de mesurer tous les effets.

10 à 15% de surfaces de bureaux plus nécessaires en raison du télétravail

Mais une première évidence s’impose, pour le secrétaire d’Etat Mathieu Michel la région bruxelloise sera très concernée : "Actuellement une bonne partie des bâtiments de l’administration fédérale est à Bruxelles même si globalement la Régie gère près de 7 millions de mètres carrés partout en Belgique. Alors on peut concevoir que la réduction des espaces de travail traditionnels va entraîner d’importantes réductions de surface à Bruxelles, il serait question d’au moins 300.000 m2, ce n’est pas négligeable, et sur l’ensemble des surfaces gérées par la Régie c’est de l’ordre de 10 à 15% de surfaces qui ne seront plus nécessaires en raison du télétravail".

L’économie réalisée pour le trésor public serait de l’ordre de 30 à 40 millions d’euros par an. Que deviendront ces surfaces ? Impossible de le préciser à ce stade car de nombreux paramètres commerciaux et réglementaires interviendront. Certains baux de l’Etat viennent à échéance prochainement, d’autres à l’horizon 2030, tout ne se fera pas d’un coup de baguette magique. Promoteurs et juristes seront mis à contribution pour limiter les dégâts collatéraux car Bruxelles devra intégrer également l’effet du télétravail sur le plan des institutions européennes, ici aussi les surfaces de bureaux seront excédentaires, avec la suppression prévue de plusieurs locations en région bruxelloise.

Un écosystème inclusif pour des lieux de travail à proximité du domicile

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Mais cette réforme amorcée se traduira aussi par des créations de nouveaux espaces de travail. En ce compris en région bruxelloise. Des lieux déconcentrés, plus flexibles, sorte de transition entre les domiciles privés situés dans les zones rurales et les ensembles des grandes Villes.

Parce que pour une partie du personnel concerné il n’est pas toujours commode de travailler à domicile faute de place ou en raison de la configuration familiale. Dans ce cas, l’idée est d’offrir une alternative évitant d’avoir à entreprendre de longs trajets.

Smartplace, des projets à Hannut, Jodoigne, Ostende

Concrètement ce projet "Smartplace" qui a démarré à Hannut, Jodoigne, Ostende est porté par la Régie des bâtiments qui a choisi de reconvertir des bâtiments dont elle dispose, souvent en partenariat avec d’autres acteurs comme Bpost par exemple, afin d’accueillir des fonctionnaires fédéraux tout en permettant à d’autres types d’activités de venir s’y greffer. Le potentiel de reconversion est immense si l’on sait que la Régie des bâtiments dispose de 600.000 m2 actuellement inoccupés sur le territoire belge.

Les termes qui reviennent sont proximité, coworking, formation, la formule se voulant à l’image d’un écosystème inclusif ouverte aux métiers de demain et permettant à des microprojets d’entreprises de bénéficier d’un ensemble de services sur place.

"Globalement si on fait le travail sur Bruxelles et sur l’ensemble du pays, on peut atteindre une économie pour l’Etat de l’ordre de 100 à 150 millions par an tout en étant en capacité de fournir des espaces de télétravail", estime Mathieu Michel.

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