Belgique

Thierry Bodson à Jeudi en Prime : la FGTB prépare une "riposte dure"

Thierry Bodson était l’invité de Jeudi en Prime, alors que la FGTB rejette l’accord sur les salaires négociés par la majorité gouvernementale.

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Par Jean-François Noulet

Thierry Bodson, le Président de la FGTB, était l’invité de l’émission Jeudi en Prime sur la Une, après le Journal Télévisé. Devant l’échec des négociations pour un accord interprofessionnel, le gouvernement d’Alexander De Croo avait repris la main. La nuit dernière, les partenaires de la majorité ont négocié pour aboutir à une proposition de médiation. Dans cet accord du gouvernement, la marge salariale de 0,4% à laquelle s’ajoutera l’indexation, est maintenue. Là où les syndicats auraient souhaité pouvoir négocier des augmentations supérieures à 0,4% dans les secteurs ayant mieux résisté à la crise, le gouvernement a préféré opter pour une prime de maximum 500 euros net. 

Cette prime pourra être accordée aux travailleurs dans les entreprises qui pourront se le permettre. Cet accord a été passé à la loupe ce jeudi matin par la FGTB qui avait convoqué un bureau exceptionnel. Pour la FGTB, pas question d’accepter cette proposition de médiation du gouvernement.

La prime, "plus de la moitié des travailleurs n'en bénéficieront pas"

En interview à la RTBF et à la Chambre cet après-midi, le Premier ministre, Alexander De Croo a qualifié de "bon accord raisonnable et équilibré" la proposition faite par le gouvernement aux partenaires sociaux. Ce n’est pas l’avis de Thierry Bodson, le Président de la FGTB. Quand on l’interroge sur la prime "Corona" de 500 euros net, Thierry Bodson avertit : "plus de la moitié des travailleurs n’en bénéficieront pas".


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Selon lui, cela s’adresserait même plutôt à "10 ou 15% des travailleurs dans les entreprises qui ont le mieux performé". De plus, ajoute Thierry Bodson, cela représenterait "20 euros par mois" pour ceux qui en bénéficieraient, puisque les 500 euros sont à répartir sur deux ans. Pour rappel, la FGTB demandait à pouvoir négocier des augmentations de salaires de plus de 0,4% dans les secteurs qui pouvaient se le permettre.

Pour la FGTB, il faut une trajectoire de rattrapage du salaire minimum à partir de 2022

La FGTB est aussi insatisfaite de la proposition du gouvernement parce qu’elle n’apporte pas suffisamment de réponses à la demande des syndicats de revoir le salaire minimum. Thierry Bodson rappelle que le salaire minimum "n’a plus évolué depuis 2008". "Si on ne fait rien dans cet accord interprofessionnel, cela fera 14 années sans évolution", avertit-il. Dès lors, "il faut qu’à partir de 2022, on prévoit une trajectoire de rattrapage du salaire minimum", demande le patron de la FGTB.

Ce jeudi, le Président du Parti Socialiste, Paul Magnette, était interrogé sur la proposition d’accord salarial du gouvernement. Pour Paul Magnette, il s’agissait d’un accord qui incluait une négociation à venir sur le salaire minimum. "La hausse du salaire minimum est un combat fondamental pour les socialistes et fait partie intégrante de la proposition de cette nuit. Si les patrons refusent celle-ci, il n’y aura d’accord sur rien et ce sera la liberté totale de négociation salariale", avait averti Paul Magnette sur Twitter. 

Ce à quoi Thierry Bodson, de la FGTB répond "ce n’est pas ce qu’on a compris". Selon le Président de la FGTB, l’accord présenté par le gouvernement comporte "une page à propos de la fameuse prime" puis, "15 lignes" qui concernent entre-autres le salaire minimum. Il y est question de "travailler à une trajectoire, sans donner le point de départ puisqu’on dit que ce sera après la crise Covid", précise Thierry Bodson. "On parle de possibilité", ajoute le Président de la FGTB qui ne peut accepter faute de certitude.

Contraindre le patronat à négocier les salaires ?

Pour Thierry Bodson, "s’il n’y a pas de bonne volonté des employeurs, on ne va pas avancer au sein du Groupe des Dix" (le groupe où les représentants du patronat et du monde syndical se retrouvent pour la concertation sociale). Le Président de la FGTB ajoute, à propos des patrons, "le texte les met dans un fauteuil".

Or, pour la FGTB, la négociation sur les salaires reste la principale pierre d’achoppement. "Le gros coup à passer, c’est la négociation sur les salaires", estime Thierry Bodson. "Il faut qu’il y ait une contrainte vis-à-vis du banc patronal pour engager la négociation sur le salaire minimum", plaide le Président de la FGTB.

Selon Thierry Bodson, il est possible de trouver des accords avec le patronat dans d’autres domaines. D’ailleurs, explique le patron de la FGTB, des accords sont conclus avec le patronat au sein du CNT, le Conseil National du Travail à propos de sujets autres que les salaires. C’est lorsqu’il est question de salaires que cela coince. En cause, selon Thierry Bodson (et les syndicats en général), la loi de 1996 sur la compétitivité, révisée en 2017. "Cette loi de 1996, telle que révisée en 2017 bloque la concertation sociale", estime Thierry Bodson.

Pour la FGTB, les libéraux pèsent plus au gouvernement que les socialistes et les progressistes

Thierry Bodson se dit "très, très déçu" par l’accord trouvé au gouvernement sur les salaires. Du côté syndical, on souhaitait y voir figurer trois points, la possibilité de négocier des augmentations salariales, une avancée sur le salaire minimum et le retour des prépensions comme solution pour les restructurations à venir. Rien de tout ça ne s’est concrétisé. 


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De quoi douter, du côté de la FGTB, du poids des socialistes et des progressistes au sein de la majorité gouvernementale. "Il y a un problème à l’intérieur de ce gouvernement", explique Thierry Bodson. "Au démarrage, on nous avait dit qu’il y avait sept partis au gouvernement, quatre qui sont progressistes et trois qui le sont moins, à quatre contre trois, on va chaque fois gagner des matchs", rappelle Thierry Bodson. "Il faut croire que les trois autres sont très très forts parce qu’ils gagnent très souvent les matchs", estime le Président de la FGTB.

Il y aura des actions syndicales : "une riposte assez dure"

Le Président de la FGTB confirme que "toutes les centrales professionnelles de la FGTB et de la CSC ont envoyé un courrier au gouvernement". Si le cap ne change pas, il y aura des actions. Thierry Bodson annonce une "riposte assez forte, assez dure". Il faut du concret à propos du salaire minimum. "On ne peut plus accepter que les gens travaillent à des salaires de moins de 10 euros de l’heure et que 20% des travailleurs soient dans la pauvreté". ajoute le Président de la FGTB.

Que pense le liégeois Thierry Bodson des Affaires liégeoises ?

Liégeois d’origine, Thierry Bodson a aussi interrogé sur ce qu’il pense des Affaires qui secouent le monde politique et économique liégeois et singulièrement des personnalités socialistes. "J’espère qu’une fois pour toutes, on va sortir de cela", souhaite-t-il. "Ce qui a fait du mal au Parti socialiste et donc à un des partis censés représenter la classe ouvrière, ce sont les affaires et encore les affaires. Il faut sortir de cela parce que ce sont les travailleurs qui payent les pots cassés en bout de chaîne", estime Thierry Bodson.

"Un des partis censés représenter la classe ouvrière", une tournure de phrase qui permet de rappeler qu’en Wallonie, la FGTB avait plaidé pour un rapprochement des partis progressistes. "Nous continuons à penser que si un gouvernement PS-Ecolo-PTB s’était mis en place, il y aurait peut-être des équilibres meilleurs pour le monde du travail", rappelle Thierry Bodson qui s’est dit "déçu que le PTB n’ait pas accepté d’entrer dans la coalition au niveau wallon", lors de la formation du dernier gouvernement wallon. "Une chance historique" est passée, selon Thierry Bodson.

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