Reminder : Le bruit que je fais au lit n’est pas proportionnel au pied que je prends
"Comment lui dire que j’aimerais test l’anal ?", "Connais ton corps et tu pourras créer le.la partenaire sexuel.le de tes rêves.", "Reminder : Le bruit que je fais au lit n’est pas proportionnel au pied que je prends". Ces messages proviennent des comptes Instagram Merci beau cul, Jouissance Club et Je m’en bats le clito qui réunissent plusieurs centaines de milliers d’abonnés. Parmi ces posts interactifs se mêlent des informations, chiffres, conseils, témoignages ou réflexions sur l’actualité qui brisent les tabous à coups de hashtags. Il est essentiel de parler ouvertement de sexualité et de s’informer sur le sujet afin de pouvoir faire ses choix et prendre des décisions en toute confiance.
Réseaux sociaux, nouvel espace de la libération sexuelle
Aujourd’hui notre société est ultra-connectée. Instagram permet de faire passer des idées d’une manière esthétique et claire, la plateforme attire un jeune public ce qui permet d’éduquer et d’éveiller sur l’évolution de la sexualité qui demeure toujours un tabou dans la société.
Ces comptes s’expriment sans filtre et encouragent à libérer la parole sur tout un tas de sujets comme le plaisir sexuel, le consentement, le regard du sexe opposé, les problèmes médicaux mais aussi le partage d’ouvrages, de films, d’expositions ou de podcasts.
Faire tomber les tabous est essentiel car l’on observe des lacunes importantes notamment sur la connaissance du sexe féminin et pour preuve : le clitoris était absent des manuels scolaires jusqu’en 2016. Le compte Jouissance Club indique que selon le haut conseil à l’égalité français, 25% des adolescentes de 15 ans ne savent pas qu’elles ont un clitoris et 83% n’en connaissent pas sa fonction.
Tout ce qui est clitoris, plaisir, masturbation c’est par ces comptes-là que j’ai appris tout ça
Margot, 23 ans, est abonnée à beaucoup de comptes qui traitent du sexe positif ce qu’elle apprécie c’est la dédramatisation de la sexualité : "J’ai découvert ces comptes lorsque je m’intéressais au féminisme car il fallait libérer la parole sur le plaisir féminin. Ce n’est pas un problème si tu es une femme et que tu aimes le sexe. Quand ta référence ce sont les sites porno mainstream, tu as une vision très particulière de ce que devrais être le sexe en matière de temps, performance, " ordre " de l’acte… Ça change de l’éducation sexuelle qu’on reçoit à l’école qui est basée uniquement sur la reproduction ou contraception sans parler de plaisir ou de consentement. Tout ce qui est clitoris, plaisir, masturbation c’est par ces comptes-là que j’ai appris tout ça super tard alors que selon moi ce sont des choses qui doivent s’apprendre tôt, notamment le consentement qui est une notion importante. Il y a plein de petits bons plans comme l’utilisation de sex-toys c’est super pratique !"
Elodie a 32 ans, elle s’est inscrite il y a peu sur Instagram : "J’ai toujours essayé de comprendre ma sexualité, cela m’a toujours questionné. J’ai déjà souffert de l’image qu’on renvoyait des femmes. J’apprends des choses sur le corps féminin ou les pratiques sexuelles sur ces comptes et certains me font rire comme Orgasme et moi avec ses stories tous les dimanches soir qui partage des témoignages insolites. Il y a cet esprit de communauté qui me rend curieuse. Cette révolution sexuelle 2.0 est salvatrice, il y a une réappropriation du corps des femmes par les femmes, c’est le début d’un renversement de situation, on peut s’éduquer il y a des ressources incroyables. Si ces comptes n’étaient pas là je ne sais pas où j’irai chercher ces infos, il me manquerait quelque chose. Ça soulage les gens de parler de sexualité."
Ces comptes Instagram sont donc utiles afin de pallier ces échecs dans l’éducation sexuelle des jeunes autant filles que garçons. Ils s’éloignent du cliché pornographique et replacent la sexualité dans le quotidien. Ils permettent de comprendre les relations entre partenaires sur un ton plutôt humoristique.
Le paradoxe d’Instagram sur les questions de sexualité
On le sait, les tétons féminins sont censurés sur Instagram (sauf sur les œuvres d’art) mais aussi les accouchements qui l’ont été jusqu’en 2017, le sang des menstruations ou encore les poils féminins qui sont "cachés" par l’algorithme.
Nous vivons dans une société hypersexualisée surtout par rapport au corps de la femme mais dès que ce sont ces dernières qui élèvent les voix sur ce sujet, elles reçoivent les foudres de la Silicon Valley. Pour preuve, des comptes comme Jouissance club ou Merci beaucul ont été supprimés à deux reprises ces derniers mois. June, la créatrice de Jouissance club, a indiqué à Axelle Mag que "tous les comptes qui parlent de sexualité ont été visés en même temps, on pense bien évidemment à des groupuscules antiféministes organisés…". Suite à ces nombreux signalements et avant leur vérification, ces comptes ont été mis en veille automatiquement.
Mais en réaction, les communautés de ces comptes se sont mobilisées via le hashtag de soutien #SexualityIsNotDirty ("la sexualité n’est pas sale") qui s’est répandu sur les réseaux sociaux et leur ont fait gagner quelques dizaines de milliers d’abonnés supplémentaires une fois les comptes rouverts.
Certains comptes subissent aussi ce qu’on appelle du "shadowbanning", c’est-à-dire qu’un compte est retiré du fil d’actualité sans être supprimé car ils n’ont pas respecté les codes puritains de la plateforme.
Les comptes Instagram à suivre pour une sexualité bienveillante
Entre fantasmes, sex-toys, jouissance féminine, représentation du clitoris, voici une sélection de comptes Instagram qui décomplexent la sexualité féminine et brisent les tabous du plaisir pour une éducation sexuelle moderne :
Ce compte inclusif et bienveillant aux 410.000 abonnés parle à la fois de sexualité féminine et masculine et de toutes les sexualités et les orgasmes. Le concept de ce compte : les MMM. Les Mixed Marvelous Minds, ces personnes qui vous font du bien et participent aux échanges par leurs questions ou conseils.
Il faut reprendre de la base, ni l’école ni les parents n’ont fait leurs devoirs.
Nous avons contacté Charline, créatrice du compte qui nous explique sa démarche : "Ça fait longtemps que je travaille dans l’éducation sexuelle. Plus jeune, je cherchais comment atteindre l’orgasme, je ne trouvais pas de réponse à cette question dans les livres de ma mère. Notre corps est un trésor dont on ne sait pas se servir. Je pense que ce qui me différenciait quand j’ai ouvert le compte en février 2019 c’est l’écoute, tout le monde peut partager ses paroles et s’aider, mon compte rend libre, on a la capacité à se libérer, à s’approprier et vivre sa vie faisant en mettant toutes les injonctions, autocensures et interdits de côté. L’éducation sexuelle n’a pas changé depuis 15 ans, ou très peu. Il faut reprendre de la base, ni l’école ni les parents n’ont fait leurs devoirs. Le dialogue parents-enfants est complètement fermé car personne ne se donne la possibilité ni les moyens d’avoir des conversations saines autour de la sexualité. Il y a 30% de garçons sur le compte qui ont envie de faire partie du mouvement je suis ravie de les accueillir pour construire un monde moins oppressif, plus égalitaire et respectueux. Le consentement doit être un terrain de base évident pour tout le monde. Il est possible de grandir en se déconstruisant des privilèges, c’est devenu le repère aussi des hommes qui ont envie de s’éduquer et se déconstruire. Je fais un travail de recherche scientifique pour partager des infos vraies et vérifiées."