Chroniques

Comité de concertation : "Ce ne sont pas ceux qui conseillent qui payent"

© MARTIN GODFROID

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Par Himad Messoudi

Il y a deux semaines, nous écrivions que l’annonce de la réouverture des métiers de contact était un trompe-l’œil. Il y a tout lieu de maintenir cette assertion : car au final, les soins de beauté, les bancs solaires non automatisés, la pédicure, la manucure, les salons de message, les salons de tatouage, toutes ces activités ne pourront rouvrir avant le 1er mars.

Par ailleurs, le Comité de concertation, le "codeco", n’a pas tenu compte de son propre critère pour la réouverture, qui était une évolution "positive" de l’épidémie. Le Comité ne le cache pas, Alexander De Croo l’a dit : "La situation épidémiologique est mitigée." Mais, et je cite encore le Comité qui se dit "conscient que notamment les soins des cheveux contribuent de manière indéniable à améliorer le bien-être mental des citoyens." Ça peut sembler un peu cavalier voire simpliste comme argument, mais n’importe quel psychologue vous parlera de l’impact positif d’une nouvelle coupe de cheveux lorsqu’on a été mal.

Cette décision, c’est donc un signal envoyé en faveur d’une meilleure prise en compte de la santé mentale. Elle tient compte de la chute de l’adhésion aux mesures. On notera aussi une prise en compte des critiques des experts quant à la communication. Ça s’est aussi senti dans la communication : Alexander De Croo et Frank Vandenbroucke ont explicitement remercié la population pour ses efforts, un objectif intermédiaire au 1er mars a été présenté, un objectif à plus long terme aussi, mais sans date. Le terme "déconfinement" a été prononcé.

La communication, talon d’Achille des codeco, a repris quelques couleurs vendredi dernier. Cette décision de rouvrir les métiers de contact, rappelons-le, a été prise en désaccord avec les experts. Mais on notera que le Comité de concertation a voulu tout de même prendre ses précautions. Cette décision de rouvrir les métiers de contact de façon progressive, le 13 février, puis le 1er mars, c’est pour, "pouvoir évaluer l’impact épidémiologique de la réouverture des professions." En clair, en cas de très gros souci d’ici là, d’une explosion de cas et d’hospitalisations, on pourrait revoir certaines décisions. Gageons que cela n’arrivera pas, en restant prudent.

Responsabilité

Petit retour en arrière, nous sommes jeudi, c’est la réunion préparatoire finale du comité de concertation. Autour de la table, les chefs de cabinet. C’est souvent cette réunion qui préfigure le menu définitif du comité de concertation. On a entendu sur nos antennes, ou lu dans les journaux, des appels, comme celui de Paul Magnette qui voulait qu’on discute déjà de l’horeca pour que des décisions soient envisageables au prochain codeco. Finalement, figurez-vous, pas un mot n’a été prononcé en ce qui concerne l’horeca, nous dit-on, personne, aucun gouvernement n’aurait fait de demande à propos de l’horeca lors de cette réunion préparatoire. Il y a eu d’autres demandes : par exemple sur un élargissement de la bulle pour les étudiants du supérieur, ou à propos de la réouverture de la culture. Et à chaque fois, une fin de non-recevoir. Au point où le chef de cabinet du Premier ministre a dit ceci : "Ce ne sont pas ceux qui conseillent qui payent".

Que comprendre ? Cela signifie que toutes les personnes qui estiment qu’il faudrait rouvrir ceci, cela, toutes ces personnes qui viennent avec des demandes fortes pour certains secteurs, ne paieront pas le prix politique, ne seront pas jugées responsables si les chiffres de l’épidémie devaient déraper. Imaginons, scénario catastrophe, que l’épidémie reprenne de la vigueur : qui sera pointé du doigt ? Sera-ce Elio Di Rupo, Pierre-Yves Jeholet, Paul Magnette, Georges-Louis Bouchez ? Non.

Les responsables désignés seront le Premier ministre Alexander De Croo et surtout le ministre fédéral de la Santé Frank Vandenbroucke, de la même façon que Maggie de Block avait été désignée coupable l’an dernier.

Ce matin, dans La Libre, Elio Di Rupo en remet une couche sur l’horeca, arguant que lui et ses collègues, avaient une "responsabilité plus globale" que celle de Frank Vandenbroucke. C’est vrai. Reste qu’on peut discuter de la gestion du gouvernement wallon, en ce qui concerne les maisons de repos, ou les mesures de soutien. Mais on ne parlera pas de la responsabilité de l’équipe Di Rupo dans l’augmentation des cas positifs.

Pourtant, la Wallonie surperforme dans ce domaine : 41% de cas positifs pour 31% de la population, depuis le début de la pandémie. Elio Di Rupo dit aussi dans La Libre que c’est la tendance des hospitalisations qui est essentielle. Ce matin, celles-ci, en moyenne hebdomadaire, sont en augmentation, avec le Hainaut qui est la province qui compte le plus de patients en soins intensifs. Et c’est pour ça que Frank Vandenbroucke reste sur ses positions. C’est sa responsabilité. Car, retenez bien cette phrase, "ce ne sont pas ceux qui conseillent qui payent".

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