Vaccination : pourquoi la Belgique semble-t-elle aller moins vite que d’autres pays ?

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Par M.A.

La Belgique est-elle à la traîne en matière de vaccination ? La campagne de vaccination officielle a démarré le 5 janvier, dans les maisons de repos.

Le premier vaccin disponible à l’époque est celui de la firme Pfizer/BioNTech. Depuis le 18 janvier, celui de Moderna est aussi livré en Belgique, mais pour l’instant les quantités sont très modestes.

C’est aussi à cette date que démarre une nouvelle phase de vaccination avec le personnel soignant des hôpitaux et l’entièreté du personnel des maisons de repos.

Un troisième vaccin devrait être disponible prochainement, celui d’AstraZeneca. L’évaluation de l’Agence européenne du médicament (EMA) est attendue ce vendredi. Après ce rapport, la Commission européenne devra encore autoriser la mise sur le marché pour les Etats membres.

Des retards

Le 15 janvier dernier, on apprenait que des retards dans la livraison des vaccins étaient annoncés par la firme Pfizer/BioNTech avec un impact sur toute la chaîne de vaccination. Rappelons néanmoins que selon la firme, cette diminution des livraisons doit permettre d’adapter la ligne de production pour augmenter la cadence les semaines suivantes.

Quelques jours plus tard, c’est AstraZeneca/Oxford, le troisième fournisseur de vaccins prévu en Belgique, qui annonce à son tour des retards de production. Et pas plus tard qu’hier, la firme pharmaceutique annonce qu’elle prévoit de ne livrer à l’UE qu’un quart des vaccins prévus au 1er trimestre. Pas simple dans ces conditions d’établir une stratégie de vaccination qui tienne. Mais cela n’a évidemment pas seulement un impact pour la Belgique.

Les chiffres

A ce jour, et selon les derniers chiffres disponibles chez Sciensano, la Belgique a vacciné 243.412 personnes avec une première dose. Dans ce tableau on apprend aussi que la couverture totale de la population atteint 2,12% ou 2,64% des plus de 18 ans et qu’une deuxième dose a été administrée à un peu plus de 3450 personnes.

Situation au 27/01/2020 de la vaccination en Belgique
Situation au 27/01/2020 de la vaccination en Belgique © Sciensano

Toujours au niveau des chiffres communiqués par les autorités, pour garantir la deuxième dose en temps et en heure, les vaccins administrés plafonneront dorénavant à 54.300 par semaine.

Il y a deux semaines ce chiffre atteignait les 71.000 doses et 125.000 la semaine du 18 janvier. Bref, la prudence est, semble-t-il, de mise.


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Au niveau européen, voici un graphique fourni par Our World in Data dans lequel on peut comparer le nombre de doses administrées pour 100 personnes dans la population totale au 27 janvier.

On peut voir que la moyenne européenne est de 2,28. La Belgique atteint 2/100 habitants et Malte un peu plus de 5/100. Notons qu’au niveau des sources qui alimentent le site, pour la Belgique le site analyse les chiffres communiqués par Sciensano.

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Autre analyse, celle produite par le site Politico. Dans cet article, le site d’informations estime que sur la base du rythme actuel de vaccination et donc du nombre de doses quotidiennes, le pourcentage de la population qui serait vaccinée avant la fin de l’été serait de 14% en Belgique et 37% à Malte.

Le Royaume-Uni qui ne fait plus partie de l’Union européenne atteindrait les 87% à la même période. "A ce rythme-là, la Belgique pourrait atteindre l’objectif des 70% de la population adulte vaccinée en 2024" en concluent ceux qui parcourent ce graphique.

Réponse des autorités

On s’en doute, un pays n’est pas l’autre. Les stratégies de vaccination ne sont pas les mêmes, mais comment peut-on expliquer ces chiffres bruts qui ne rassurent pas ?


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Actuellement, nous dit-on, il faut agir au jour le jour. "Quand on a commencé à recevoir le vaccin Pfizer/BioNTech, on avait un calendrier prévisionnel. Ça, c’est le cas pour tous les vaccins et c’est le cas pour tous les Etats membres de l’Union européenne", insiste Sabine Stordeur, coresponsable de la taskforce fédérale vaccination.

Cela concerne concrètement pour les 27, l’autorisation de la mise sur le marché de la Commission européenne, la livraison des vaccins et enfin une distribution proportionnelle à la taille de la population. "Il ne faut vraiment plus nous comparer avec le Royaume-Uni qui est sorti de l’Union européenne et qui a donc ses propres règles avec différents vaccins sur leur marché à des dates différentes et avec des volumes différents".

Pour la taskforce fédérale vaccination, la Belgique disposait d’un calendrier prévisionnel, au début du mois de janvier, qui tenait la route. C’est-à-dire que les doses délivrées correspondaient au moins à celles qui étaient prévues. Et puis, il y a eu une baisse des livraisons, des retards, sans oublier des quantités moindres que prévues aussi annoncées. Tout cela oblige à revoir le planning de vaccination.

Changement de plan (provisoire)

Tenant de compte de ces expériences, de ces incertitudes et afin d’éviter d’autres mauvaises surprises dans les semaines à venir, Sabine Stordeur nous détaille les décisions qui ont été prises : "On a très fortement accéléré la campagne de vaccination en janvier, pour vacciner le plus possible les personnes vulnérables avec une première dose. Vu les incertitudes sur les calendriers de livraison en quantité et en délai, on va s’assurer une marge de sécurité".

Et pour garantir cette sécurité, le nombre de premières doses à administrer a été limité à 54.300 par semaine. Cette mesure est donc déjà d’application pour cette quatrième semaine de vaccination et ce n’est un hasard : "on doit administrer la première dose à de nouvelles personnes, mais on commence à administrer les deuxièmes doses à ceux qui ont été vaccinés au cours des trois dernières semaines". En résumé, il faut assurer aux premières personnes vaccinées de recevoir la deuxième injection et continuer à administrer la première dose.

Exemple : à la troisième semaine de vaccination, 125.000 personnes ont été vaccinées. Elles devront dès lors recevoir une deuxième dose dans deux semaines, en plus des 54.300 personnes qui recevront leur première dose. Au total, la semaine du 8 février ce sont 179.300 doses qui devraient être administrées.

"Si rapidement, d’ici une ou deux semaines, nous avons davantage de garanties et de certitude que les prochaines livraisons suivront le calendrier prévisionnel, le plafond va pouvoir être relevé".


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Des pays avec d’autres stratégies

Dans certains pays, le débat se poursuit autour de la deuxième dose. En France, par exemple, la Haute Autorité de Santé préconise, dans le contexte actuel et "afin de protéger plus vite un plus grand nombre de personnes à risque d’hospitalisation ou de décès d’élargir à 6 semaines le délai entre 2 doses de vaccin à ARN messager (vaccins de Pfizer et de Moderna)". Mais au final, comme on peut le lire sur le site de francetvinfo, ce délai sera maintenu à "3 ou 4 semaines" a annoncé le ministre de la Santé, Oilvier Véran.

Cela "tient la route" analyse Sabine Stordeur, parce que dans leurs essais cliniques Pfizer avait tenu de compte de cette éventualité d’administrer la deuxième dose dans un intervalle plus long. Mais d’un point de vue logistique : "si dans trois semaines on n’a pas une augmentation des livraisons de Pfizer/BioNTech, six semaines plus tard vous avez encore plus de personnes à qui il faut donner la deuxième dose".


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Prudence avec les comparaisons

Concernant les analyses réalisées actuellement sur le nombre de doses administrées en Europe et dans le monde, Sabine Stordeur reste très prudente et rappelle que tout dépend des données encodées.

Ces pays ont-ils la même stratégie de vaccination ? Ont-ils visé les populations les plus vulnérables, puis le personnel des soins de santé, etc. ? Donnent-ils à chaque fois les deux doses et dans quel délai ? "Sans avoir exactement la même base de comparaison, moi je ne m’aventurerais pas à comparer nos chiffres à d’autres Etats de l’Union européenne".

Quant à Israël ou le Royaume-Uni, la spécialiste insiste : "ils ont eu les vaccins bien avant nous. Ils les ont payés très cher et donc ils n’ont pas été contraints par un volume".


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La Belgique en retard ?

"On n’a pas de retard", nous explique toujours Sabine Stordeur. "On suit le calendrier comme on l’avait prévu en tenant compte des livraisons". Et elle espère : "Ça pourrait être une accélération, si des nouvelles positives de Pfizer nous venaient […] On ne peut aller qu’en accélérant, mais on n’a pas de retard par rapport à ce qui était prévu".


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