L’Europe doit se préparer à une deuxième vague mais elle ne sera pas nécessairement désastreuse, selon la responsable européenne du coronavirus

Andrea Ammon, la directrice du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies, lors d’une conférence de presse sur l’épidémie de Covid-19 à Rome (26 janvier 2020).

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Par Grégoire Ryckmans

Pour Andrea Ammon, la question qui se pose à propos d’une seconde vague de contamination de coronavirus en Europe n’est pas tellement de savoir si elle aura lieu, mais plutôt "quelle sera l’ampleur du phénomène ?".

Elle invite ainsi les Européens à continuer à respecter les mesures afin de faire en sorte que cette deuxième vague ne soit pas désastreuse.

Interrogée par le Guardian, la responsable indique également qu’elle pense que les vacances au ski du mois de mars ont joué un rôle essentiel dans la propagation du coronavirus en Europe.


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La perspective d’une deuxième vague d’infection de coronavirus en Europe n’est plus une théorie lointaine, selon la directrice de l’agence européenne chargée de conseiller les gouvernements en matière de lutte contre les maladies. "La question est de savoir quand et avec quelle ampleur, c’est la question à mon avis", estime le Dr Andrea Ammon, la directrice du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies infectieuses (ECDC).

Ce n’est pas le moment de se relâcher complètement

Andrea Ammon est une épidémiologiste allemande. Cette ancienne conseillère du gouvernement allemand observe avec attention l’évolution du coronavirus en Europe depuis la Suède, où l’ECDC a son siège.

"En regardant les caractéristiques du virus, et en observant ce qui émerge des différents pays en termes d’immunité de la population", elle estime que le taux d’immunité des individus au coronavirus "ne se situe qu’entre 2% et 14%, ce qui laisse encore 85% à 90% de la population susceptible de contracter le virus".

"Le virus est autour de nous, et il circule beaucoup plus qu’en janvier et février… Je ne veux pas faire une fresque apocalyptique mais je pense que nous devons être réalistes. Ce n’est pas le moment de se relâcher complètement".

Pourtant, au début du mois de mai, l’ancienne médecin, qui a travaillé aux différents étages de la bureaucratie des soins de santé pour devenir directeur de l’ECDC en 2017, a annoncé qu’au 2 mai, l’Europe dans son ensemble avait dépassé le pic des infections. Seule la Pologne n’y était pas encore arrivée techniquement, avait-elle déclaré.

Le sentiment dans la population que la crise est finie

Depuis quelques semaines les gouvernements européens ont commencé à assouplir leurs restrictions en matière de confinement, certains au point que les bars et les restaurants rouvrent progressivement, d’autres de manière plus timide.

Andrea Ammon insiste sur le fait qu’une deuxième vague désastreuse de contaminations au coronavirus n’est pas inévitable si les gens respectent les règles et gardent leurs distances. Mais elle détecte un affaiblissement inquiétant de la détermination du public à se conformer aux recommandations des autorités publiques et à ne pas relâcher leurs efforts.

"Et surtout maintenant qu’il est clair que [les infections] sont en baisse, les gens pensent que c’est fini. Ce qui n’est pas le cas, ce qui n’est certainement pas le cas".

À la question de savoir si les données analysées par l’ECD montraient des répercussions de ces mesures de déconfinement, Ammon répond au Guardian de façon légèrement sarcastique : "Pas encore. Je veux dire, peut-être que ça ne viendra jamais, peut-être que tout l’ajustement de ces mesures est fait de manière prudente. C’est quelque chose que nous surveillons vraiment de près en ce moment : ce qui est en train de se passer après toutes ces mesures".

Retour sur le début de la crise en Europe

Mme Ammon a aussi rappelé que ce n’est que fin janvier qu’il est apparu clairement qu’un nouveau virus causant une série de décès dans la ville chinoise de Wuhan pouvait être transmis d’homme à homme, les premières inquiétudes se concentrant sur la possibilité que la maladie se propage par le biais des importations.

Face à la nature extrêmement contagieuse du virus, l’ECDC a conseillé aux gouvernements, le 26 janvier, de renforcer les capacités de leurs services de santé. On craignait qu’ils ne soient débordés, comme ce sera bientôt le cas avec les résultats tragiques en Lombardie, dans le nord de l’Italie.

"Nous avons vraiment insisté sur le fait que ces plans devaient être mis à jour. Et en particulier, la préparation des hôpitaux qui devait être examinée, comment s’assurer d’une capacité suffisante pour les lits, en général, mais aussi en particulier pour les lits des unités de soins intensifs".

"Je pense que les gouvernements ont sous-estimé, à mon avis, la vitesse à laquelle cette augmentation (de cas) s’est produite. Parce que, je veux dire, vous savez, c’est une situation différente si vous devez chercher une augmentation de la capacité de lits dans les deux semaines ou dans les deux jours".

Ammon pense également que lorsque les inévitables enquêtes se pencheront sur les rebondissements de la crise, le retour des vacanciers des vacances de ski alpin au cours de la première semaine de mars sera considéré comme un moment charnière dans la propagation du Covid-19 en Europe.

Et pour la suite ?

La professeure allemande pense à présent que la bataille contre le coronavirus sera longue. "Je ne sais pas si c’est pour toujours, mais je ne pense pas qu’il va disparaître très rapidement. Il semble être très bien adapté aux humains".

Concernant les vacances d’été, elle met en garde ceux qui ont envie de passer des vacances d’été normales pour déconnecter, ils risquent d’être déçus : "Ce que nous disons, c’est qu’ils doivent se préparer à ce que même s’il y a des vacances et qu’ils vont quelque part, ce ne sera pas comparable à ce qu’ils ont eu l’année dernière. A ce stade, nous ne pouvons pas dire que vous pouvez aller là-bas, vous laver les mains et que tout va bien. Vous devez garder vos distances. Ces mesures doivent être mises en place".

 


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