"Le masque est au Covid-19 ce que le préservatif est au sida": il doit devenir obligatoire dès maintenant selon ce docteur
Marie-Gabrielle Cuvelier, médecin généraliste à Renaix depuis 33 ans, justifie: "via nos postillons, un nuage de micro-particules potentiellement contagieux se forme et se déplace sur 4 à 5 mètres, restant présent plus de 20 minutes, c'est là le gros problème".
- Publié le 10-04-2020 à 12h14
Marie-Gabrielle Cuvelier, médecin généraliste à Renaix depuis 33 ans, justifie: "via nos postillons, un nuage de micro-particules potentiellement contagieux se forme et se déplace sur 4 à 5 mètres, restant présent plus de 20 minutes, c'est là le gros problème".
Doit-on tous porter un masque lorsque nous quittons notre domicile ? La question est en tout cas sur la table de la Task Force chez nous. L'objectif ? Donner des recommandations claires à la population d'ici lundi. Ce groupe de travail est composé de représentants du Conseil supérieur de la santé, de l’Agence des médicaments, de l’administration de la santé et du "Comité scientifique coronavirus" qui épaule le gouvernement. Ensemble, ils doivent préparer une recommandation sur l’utilisation des masques, que ce soit par les professionnels de la santé ou les particuliers, leur attribution et les circonstances dans lesquelles ils doivent être portés.
D'ailleurs, le maire de Sceaux en France, Philippe Laurent, a rendu obligatoire le port du masque de sa ville à partir de ce mercredi 8 avril. Concrètement, tous les habitants de plus de 10 ans doivent porter un masque recouvrant le nez et la bouche lorsqu'ils sortent. Et à Nice, le maire Christian Estrosi, lui-même guéri du coronavirus, va faire distribuer des masques en tissu réutilisables à tous les habitants. Le port du masque y sera ensuite rendu obligatoire. Pour Olivier Véran, Ministre de la Santé, "la question est ouverte" concernant le port obligatoire d'un masque.
Protection des citoyens, vécu sur le terrain, recommandations, nous avons posé quelques questions à Marie-Gabrielle Cuvelier, médecin généraliste à Renaix depuis 33 ans (à droite sur notre illustration), afin d'en savoir plus sur l'efficacité d'une telle mesure.
Aujourd'hui, est-nécessaire de porter un masque quand on sort en plein air ?
"Totalement. Une étude a été menée récemment par des scientifiques japonnais et montre que par nos postillons, un nuage de micro-particules se forme et se déplace sur 4 à 5 mètres, restant plus de 20 minutes, c'est là le gros problème. En effet, dans notre population, il y a des porteurs sains qui ont le virus mais sont en bonne santé et peuvent le transmettre lorsqu'ils font leurs courses ou leur jogging quand il éternuent par exemple et ce même en plein air. Il faut vraiment prendre cette mesure en urgence pour enrayer l'épidémie".
Vous parlez de la ville d'Hong-Kong comme d'un exemple en la matière, pourquoi ?
"Il y a là-bas 7,5 millions d'habitants pour une densité de 7000 habitants au kilomètre carré, c'est 20 plus que la Belgique (où la densité et de 372 au kilomètre carré. Mais là-bas, depuis le début de l'épidémie, 600 cas positifs et 4 décès ont été constatés. L'énorme différence, c'est le port du masque. On peut s'y balader, on croisera personne sans masques. D'ailleurs, la vie n'est pas confinée là-bas, le port du masque obligatoire du masque change tout".
Mais les masques manquent pour les professionnels de la santé, alors comment faire au niveau de la population pour s'en procurer ?
"Sur internet, tout le monde peut en faire, on trouve de très bons tutoriels pour confectionner chez soi des masques en tissu, il n'est pas nécessaire de porter des masques chirurgicaux. D'ailleurs, je conseille d'ajouter, pour faire filtre, quelques épaisseurs en filtre à café ou avec de l'essui-tout qu'on change régulièrement. Et tous les soirs, de faire bouillir son masque pour qu'il soit stérilisé. Contre le Covid, sortons couvert, sortons masqués ! Le masque est au Covid-19 ce que le préservatif est au HIV".
De votre côté, êtes-vous suffisamment protégée ?
"J'ai seulement reçu un petit paquet de masques de la part du cercle des médecins et 100 autres du gouvernement, mais ce n'est pas du tout suffisant vu que rythme où ils partent. On en reçoit plus rien désormais, on doit remplir un formulaire chaque soir pour indiquer si nous sommes en pénurie, j'indique alors que je suis en situation de grande pénurie mais rien ne change. Même si le nombre de consultations a largement diminué, on continue de recevoir des patients et dans certains cas, on ne peut pas se limiter à être de simples téléphonistes, il faut parfois voir les gens, et le risque de contagion est donc bien réel mais je ne laisserai pas tomber mes patients. Actuellement, je vois 5 personnes par jour contre 15 en temps normal. D'ailleurs, le collège de Médecine a été clair, il ne faut pas jouer aux héros mais il faut trouver un juste milieu".
Vous faites du port du masque votre combat mais n'est-ce pas trop tard ?
"Non, pas du tout, il y a encore des meubles à sauver ! Même une fois sorti du confinement, il faudra continuer à le porter. Tester 11 millions de personnes est impossible, les gens vont ressortir et si tout le monde le porte, il n'y aura pas de problème de distanciation. A côté de ça, il y a des gestes de tous les jours à acquérir qui partent du bon sens".
Côté traitement, étant donné qu'il faudra attendre encore plusieurs mois avant l'arrivée d'un vaccin, que pensez-vous des travaux du Docteur Raoult concernant la chloroquine ?
"Je pense qu'il ne ne faut pas tout jeter aux orties. Le professeur Raoult est fort critiqué mais il reste un des experts les plus réputés au monde en infectiologie. Il a 20 ans d'expérience derrière lui, je crois qu'on peut lui faire confiance. Il connaît les avantages et les inconvénients du Plaquénil. Bien sûr que les doses massives ne correspondent pas à tous les patients et que cela dépend de l'avancée de la maladie. Mais je crois qu'on pinaille actuellement, au vu de l'urgence, il faut donner le traitement dès le départ".