Confinement : "la violence contre les femmes va augmenter et s'intensifier"

Confinement : "la violence contre les femmes va augmenter et s'intensifier"

© OPHELIE DELAROUZEE - BELGA

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Par Melanie Joris et Marc Sirlereau

À l’heure du coronavirus et du confinement, les associations s’inquiètent du sort des femmes victimes de violences conjugales. Désormais, ces femmes sont confinées 24 heures sur 24 avec un partenaire abuseur. Les associations craignent une escalade des violences psychologiques et physiques. Et demandent que des mesures soient prises pour d’abord gérer l’urgence. Avant de s’attaquer, enfin, à ce problème de manière structurelle.

Être confiné, cela rend notamment inaccessible les maigres ressources à disposition des femmes victimes de violence. Il existe bien des lignes d’écoute, mais comment passer un coup de fil discrètement quand vous habitez avec votre agresseur ? Cette difficulté est d’ailleurs bien perceptible au sein de la ligne Écoute Violences Conjugales. Son responsable, Jean-Louis Simoens, observe une flambée d’appels venant de la famille, de proches ou d’amis de victimes connues de violences conjugales. "Les proches sont des facteurs de protection, ils contribuent à la sécurisation des victimes en leur offrant une possibilité de s’échapper à la violence. Aujourd’hui, cette possibilité est mise à mal par le confinement", constate Jean-Louis Simoens.

Les refuges sont aussi dans une situation toute particulière. Céline Caudron, coordinatrice nationale de l’association Vie Féminine : "Les maisons d’accueil fonctionnent en circuit fermé à cause du confinement donc elles n’accueillent pas de nouvelles hébergées pour le moment", observe-t-elle.

Pour les associations, cette situation exceptionnelle met en lumière "la précarité des actions de prévention primaire qui visent à diminuer les violences faites aux femmes". Elles proposent donc six mesures à prendre immédiatement.

6 mesures à prendre tout de suite

D’abord, entreprendre une grande campagne de sensibilisation à l’image des campagnes qui passent actuellement à la télé et à la radio et qui nous invitent à rester chez nous. Ici, il s’agirait de messages pour rappeler l’existence des lignes d’écoute par exemple.

Ensuite, renforcer ces lignes d’écoute et les rendre accessibles en permanence. Les associations proposent également que ces lignes soient accessibles par SMS puisqu'il s'agit d'un moyen de communication plus facile et plus discret. L’idée serait aussi que ces lignes deviennent des lignes d’urgence, en contact avec les services de secours.

La troisième proposition est martelée depuis longtemps par les associations : que la lutte contre les violences faites aux femmes devienne une réelle priorité dans toutes les zones de police. Cela passerait notamment par une démarche proactive de la part des policiers. Ceux-ci pourraient se rendre au domicile des femmes qui ont dénoncé des violences pour s’assurer qu’elles vont bien, mais aussi pour envoyer un signal à l’agresseur.

Au-delà de la police, les associations souhaitent aussi que les parquets s’emparent de ces dossiers et en fassent une priorité.

Finalement, les associations demandent de rendre accessible des lieux de replis pour ces femmes. Sans oublier les femmes qui sont plus vulnérables soit de par un handicap ou leur statut social.

Les victimes ne sont pas mises de côté

Du côté du ministre de la justice, on rappelle que l’arrêté sur les pouvoirs spéciaux permet aux procédures de se dérouler par écrit ou par vidéoconférence. "Les victimes, la violence entre partenaires et la maltraitance des enfants ne peuvent être mises de côté", assure Koen Geens. Et de préciser que 8000 licences d'un logiciel de téléconférence ont été achetées pour permettre ces audiences par écrans interposés. 

On a l’impression que la priorité de la police, c’est d’aller contrôler les gens qui se promènent dans les parcs

C’est pourtant bien ce qui inquiète les associations. Céline Caudron de Vie Féminine : "On a l’impression que la priorité de la police, c’est plutôt d’aller contrôler les gens qui se promènent dans les parcs". Et d’ajouter : "Les parquets fonctionnent en service réduit, mais ce sont eux qui peuvent ordonner l’éloignement des auteurs de violences. Ça doit rester une priorité", insiste-t-elle.

Toujours du côté du ministre de la justice, il n'y a pas d'inquiétude à se faire. Koens Geens : "Ce type d’audience est toujours possible, la justice ne s’arrête pas pendant la crise du coronavirus. Elle doit continuer à assurer la sécurité de tous", affirme-t-il.

La violence va augmenter

Les associations espèrent être entendues demain au sein de la Conférence interministérielle sur les droits des femmes.

Des mesures sont sur la table et doivent être prises d’urgence. Céline Caudron, la coordinatrice nationale de Vie Féminine, est très claire : "On sait que les violences vont augmenter et s’intensifier. Avec le confinement, le stress va monter, des tensions vont arriver. Et le passage sera plus rapide vers des violences sexuelles ou physiques voire des violences mortelles. Il faut anticiper ça !", résume-t-elle.

 

Pour joindre la ligne Écoute Violences Conjugales : 0800 30 030

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