Syrie : "La situation humanitaire à Idlib est terrifiante"

Selon l'ONU, 900.000 personnes fuient les frappes aériennes dans la région d'Idlib, contraintes de trouver refuge dans des camps qui manque de place

© RAMI AL SAYED - AFP

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Par RTBF La Première

Depuis le mois de décembre le régime syrien de Bachar Al-Assad tente de reprendre le contrôle de la Province d’Idleb, dernier gros bastion rebelle du pays. Avec l’aide l’aviation russe, il bombarde la zone avec des conséquences humanitaires catastrophiques. Pour Emmanuel Massart, coordinateur Médecins sans frontières pour la Syrie, en contact permanent avec ses équipes sur le terrain, " La situation à Idlib est terrifiante ". Il témoigne sur le plateau de CQFD : " Les structures médicales sur places, les hôpitaux sont touchés de manière très importante, parfois bombardée. Il y a, aujourd’hui, une offre de soin très diminuée, avec un nombre de personnes en demande très important. Le système de soin ne peut plus gérer la situation ".

Des enfants meurent de froid

Ce qui inquiète particulièrement le coordinateur MSF c’est que personne aujourd’hui, ni ONG, ni structures locales, ne peuvent faire face à la crise : " On peine à répondre aux besoins dans la zone. Il y a quasiment 900.000 personnes déplacées depuis le début de l’offensive. C’est impressionnant ! L’aide est excessivement faible, l’accès humanitaire, très compliqué. La situation est vraiment très préoccupante ".

 

Syrie catastrophe humanitaire à Idlib

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La situation est d’autant plus préoccupante que la frontière turque au Nord est complètement fermée. Ces civiles qui fuient les frappes s’abritent dans des camps de déplacés en plein hiver, par des températures négatives la nuit. Des bébés sont morts de froids ces dernières semaines. " Le problème qu’on a déplore Emmanuel Massart, c’est que même dans ces camps, ils ne sont plus en sécurité. Il y a deux semaines, un camp a été visé par des frappes ".

Déplacés pour la 2eme ou 3eme fois

Dès lors, MSF demande a minima le respect des règles de droit international : " il faut respecter les règles de la guerre ! Bombarder un camp, c’est inacceptable ! Il faut aussi laisser l’aide humanitaire arriver ". De son côté, Christian Olsson, professeur de sciences politiques à l’ULB rappelle que ces déplacés le sont souvent pour la deuxième ou troisième fois du conflit : " Sur les 3 millions des habitants de la Région d’Idlib, la moitié n’en est pas originaire. Ils viennent d’Alep, de Deera ou de La Goutha Orientale après la reprise de ces villes par le régime. Ce sont des gens qui ont déjà perdu des combats contre l’armée du régime. Si cette armée revient, ils seront dans le collimateur, ils doivent fuir ". Et un retour de l’armée dans cette zone, c’est ce qui risque d’arriver. Les forces armées syriennes régulières ont repris une 20 aine de villes et villages depuis le début de la semaine.

Bachar Al-Assad en passe de gagner la bataille

Cette avancée du régime dans la région, pour Christian Olsson, c’est une victoire pour Bachar Al-Assad : " Il est en train de remporter la bataille territoriale. S’il récupère les deux autoroutes principales de la région, la M4 et la M5, il ne restera plus grand-chose de cette dernière poche rebelle d’Idlib si ce n’est la zone frontière avec la Turquie ". Mais dans cette zone, la Turquie n’aura plus beaucoup de marge de manœuvre face à la Russie, l’alliée de la Syrie.

Le régime syrien est en train de remporter la bataille territoriale

Pour garder un levier dans la région et éviter un afflux massif de réfugiés vers la Turquie, son Président Erdogan a lancé un ultimatum à la Syrie et la Russie en menaçant d’une intervention militaire : " Le problème d’Erdogan c’est que la Turquie ne maîtrise pas l’espace aérien explique Christian Olsson. Il ne pourra pas mettre à exécution ses menaces, c’est plutôt symbolique. C’est pour mettre la pression, pour ne pas se retrouver à négocier avec la Russie dans une position de perdant. Mais Erdogan est en position de faiblesse ".

L’ambiguë relation Russie-Turquie

Le paradoxe dans ce triangle Russie-Turqui-Syrie, c’est que Moscou ne peut pas non plus froisser la Turquie faute de quoi Ankara pourrait revenir à sa position de 2016 qui était plutôt d’être un allié de l’OTAN. " La Russie a intérêt à bien s’entendre avec la Turquie pour être une épine dans le pied de l’OTAN " analyse Christian Olsson.

Les deux pays se rencontrent la semaine prochaine pour un sommet sur la Syrie à l’invitation de l’Allemagne et la France.

CQFD, Ce Qui Fait Débat, un face-à-face sur une question d’actualité chaque jour à 18h20 sur La Première et à 20h35 sur La Trois.

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