Dans les Jardins d’Arthey, le travail, ensemble, a du sens
- Publié le 18-01-2020 à 06h00
- Mis à jour le 12-02-2020 à 14h52
LIBRE ECO WEEK-END | Le dossier
Cultivons la diversité pour un autre modèle", annonce d’emblée le site internet des Jardins d’Arthey. Et en effet, le lauréat du Prix de l’économie sociale 2019, dans la catégorie "junior", cultive, au propre comme au figuré, un autre modèle d’organisation et de gestion économique.
Créée il y a quatre ans, la coopérative Jardins d’Arthey, située à Rhisnes (Namur), est aussi une entreprise partagée. Ces deux modèles répondaient aux valeurs des fondateurs. "Nous voulions organiser la gouvernance de façon transparente et horizontale afin que tout le monde ait voix au chapitre, qu’il n’y ait pas de cloisonnement entre le conseil d’administration et l’équipe opérationnelle. Tout cela s’est fait naturellement", raconte Floriane Heyden, la coordinatrice des Jardins d’Arthey. "Nous sommes une coopérative à finalité sociale, c’est-à-dire que, pour nous, réinvestir les bénéfices dans nos activités, dans l’accueil du public prime sur la recherche de profit pour rémunérer les actionnaires. Nos activités sont pensées pour être rentables. Toutes les personnes composant l’équipe ont créé leur emploi. Pour certains, c’est une activité complémentaire mais, même dans ce cas, ils essaient de dégager un revenu", poursuit-elle.
Soutien et encadrement sur place
Quant à l’aspect "entreprise partagée", il permet aux six coopérateurs qui sont aussi porteurs de projets de créer leur activité professionnelle au sein du domaine d’Arthey. Le site comprend un château du XIXe siècle, une ferme du XVIIe siècle et 80 hectares de terrain, mis à disposition par le propriétaire - également cofondateur de la coopérative -, moyennant loyer, fixé au prix du marché. "On fournit des servi ces aux porteurs de projets pour les aider à pérenniser leur activité : on fait la comptabilité des entrepreneurs, on les soutient dans les tâches administratives (Afsca, cotisations sociales et professionnelles, assurances…), on met à leur disposition un espace de production, on leur offre une aide à la commercialisation de leurs produits, à la communication, à l’installation via des chantiers bénévoles", explique Floriane Heyden.
Les activités développées aux Jardins d’Arthey visent "un impact sociétal positif", signale la coordinatrice, et elles sont raccord avec le lieu qui les accueille : chambres d’hôtes au château, gîte à la ferme, maraîchage bio (fruits et légumes), boulangerie artisanale, bergerie avec transformation du lait de la soixantaine de brebis en fromage, yaourt et autres produits, magasin où l’on vend ces produits, activités nature pour les enfants, festival des plantes comestibles.
Publics et coopérateurs variés
La diversité des Jardins d’Arthey se décline tant dans les profils des coopérateurs porteurs de projets (pour certains, des universitaires en reconversion professionnelle ou des personnes qui se lancent dans leur première activité), que dans le public accueilli. "Nous proposons des activités variées qui attirent des publics variés, dont des personnes en situation de handicap léger, des jeunes en décrochage scolaire. C’est une partie importante de l’aspect ‘économie sociale’", souligne Floriane Heyden.
Ce modèle économique, atypique et encore minoritaire en Belgique, a ses avantages. "Souvent, on a de grosses journées de travail mais, à la fin, on est tous épanouis et satisfaits de faire ce qu’on fait parce qu’on a des valeurs et qu’on crée des projets qui ont du sens. Ce prix que nous avons gagné nous fait d’autant plus plaisir que cela peut permettre de mieux faire connaître les modèles de l’économie sociale et d’entreprise partagée, et de donner envie à d’autres de se lancer." Mais il a aussi ses contraintes. "Notre modèle est innovant et nous ne rentrons donc pas dans les cases au niveau administratif, législatif, salarial. C’est parfois difficile d’obtenir les papiers nécessaires, les certifications, les reconnaissances. Ça prend beaucoup de temps et ça s’apparente parfois à un combat pour arriver à faire comprendre ce qu’on est en train de faire", indique la coordinatrice.
Des projets plein la tête
Pas de quoi décourager l’équipe des Jardins d’Arthey qui envisage des développements pour l’avenir. "Nous allons relancer un appel à projets cette année. Pourquoi ne pas imaginer une épicerie, une microbrasserie, un apiculteur, un petit restaurant, une ferme pédagogique, un élevage de poules ou d’escargots, une culture de champignons qui s’installeraient ici, voire hors du domaine mais en restant à proximité ? L’envie est de créer un lieu hautement productif dans tous les sens du terme : savoir, savoir-faire, alimentation et accueil de personnes", détaille Floriane Heyden.